mercredi 26 novembre 2008

La politique pénale à l'égard des mineurs

Voici le texte de quelques associations et quelques personnalités conecrnant la politique pénale à l'égard des mineurs paru dans Liberation de ce jour. Parmi les signataires je note la présence de madame Lazerges , spécialiste du droit des mineurs et qui fut Vice-présidente de l'Assemblée Nationale. C'est une personnalité que je connais pour avoir été son assistant à la faculté de droit de Pau dans les années 1970 losqu'elle était jeune agrégée. Elle a préfacé mon livre:" Justice et Litterature:Regards croisés" paru en 2004 aux éditions Atlantica.



"la commission Varinard va remettre son rapport dans quelques jours. Il lui fut demandé, par la garde des Sceaux lors de son installation, de jeter les bases d’un nouveau texte «pour une justice plus réactive et plus adaptée».
Dire le réel, c’est reconnaître que la délinquance des mineurs augmente, mais pas dans ses manifestations les plus lourdes de conséquences. Les infractions criminelles commises par les mineurs de 16 à 18 ans, traduits devant les cours d’assises des mineurs, connaissent une absolue stabilité depuis des décennies. Ce qui augmente, ce sont surtout les dégradations, les vols à l’arraché, les actes d’outrage et de rébellion de jeunes qui font l’objet de discrimination négative. Ces jeunes sont en mal, d’appartenance à notre société et d’espérance à y trouver une place. A cela, sachons répondre autrement que par une loi émotive. Le plan banlieue est en déshérence, alors qu’il aurait pu être un outil pour lutter contre la délinquance d’exclusion, celle qui préoccupe le plus à juste titre.
Dire le réel, c’est admettre que la lourdeur des peines n’est pas une solution. Les peines encourues sont déjà les plus lourdes d’Europe. Un mineur de plus de 16 ans peut être condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, un mineur de 13 à 16 ans à vingt ans de réclusion criminelle.
Que veut-on de plus ? Nous voulons clairement que les peines planchers ne puissent plus être appliquées aux mineurs, elles sont l’expression du déni de la spécificité du droit pénal des mineurs que nous sommes contraints de respecter par nos engagements internationaux. Les pays qui, comme l’Angleterre, ont durci le droit des mineurs sont en échec. En Angleterre les mineurs représentent aujourd’hui 20 % de la délinquance (taux le plus élevé d’Europe) alors qu’en Norvège ils représentent 5 % de cette même délinquance.
Dire le réel, c’est énoncer que plus que la dureté d’une peine, c’est la réalité de son exécution qui compte, ceci est vrai aussi des mesures éducatives. La sanction, quelle que soit sa nature, mesure de protection, d’éducation ou de surveillance, «sanction éducative» ou peine proprement dite doit être mise à exécution sans retard. De la sorte, seulement, elle peut participer d’une pédagogie de la responsabilité et être facteur de réinsertion.
Dire le réel, c’est expliquer que les juges pour enfants doivent avoir les moyens d’être aussi pleinement juges de l’application des peines comme la loi le leur demande : aujourd’hui, ils ne le sont pas. L’après-jugement est délaissé. Le temps long de la mise en œuvre de la réponse à la délinquance des mineurs est incompréhensible pour les adolescents. S’il est un sujet qui doit être pris à bras-le-corps c’est celui du juste temps dans la justice des mineurs, y compris le juste temps dans l’indemnisation et la réparation de la victime.
Dire le réel, c’est refuser de demander à la loi ce qu’elle ne peut pas produire. L’ordonnance du 2 février 1945, déjà malmenée à maintes reprises, a besoin d’être réordonnée, mais non pas bouleversée. Elle a surtout besoin que les moyens de son application soient inscrits au budget du ministère de la Justice. Or, précisément le budget de la protection judiciaire de la jeunesse dans le projet de loi de finance 2009 est rogné alors qu’il est indispensable qu’il soit considérablement augmenté. Toutes les forces du ministère de la Justice concernant les mineurs sont investies au-delà du raisonnable dans les établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM), alors que les mesures qui marchent, comme la réparation pénale, peinent à être mises en œuvre dans un délai raisonnable et dans de bonnes conditions.
Voilà ce qui doit être dénoncé et non un pseudo-vieillissement d’une ordonnance frénétiquement modifiée depuis 2002. Plutôt que de s’étourdir dans le mirage du changement de la loi, remobilisons les magistrats du siège comme du parquet, remobilisons tous les professionnels de la justice des mineurs (1). Donnons leur espoir de pouvoir pleinement accomplir leur mission, donnons-leur tout simplement les moyens d’exercer leurs missions. Tel est le choix politique qui s’impose, il est aux antipodes de la politique actuellement conduite par le gouvernement de Nicolas Sarkozy.
(1) Un café-justice sur la réforme du droit des mineurs aura lieu le 27 novembre à 18 h30 au Café parisien, 111 rue Monge, Paris Ve.





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