lundi 2 mars 2009

A propos du Rat et du Lapin

On connaît la demande de la Chine concernant deux statues mises en vente par Pierre Berge et qui proviennent du pillage du Palais d'été à Pekin. Voici reproduite dans un article du site Bacchich une lettre de Victor Hugo sur le sujet. Que dire sinon que le temps a passé... Il n' y a pas qu' à la Chine que nous avons volè et il n' y a pas que notre pays qui a volè. Alors, peut-on vraiment croire à une remise en état générale?


Evoquant le pillage du Palais d’été dans un courrier en date du 25 novembre 1861 adressé au capitaine Butler [1], l’auteur des Misérables, écrit : « Vous me demandez mon avis, monsieur, sur l’expédition de Chine. Vous trouvez cette expédition honorable et belle, et vous êtes assez bon pour attacher quelque prix à mon sentiment ; selon vous, l’expédition de Chine, faite sous le double pavillon de la reine Victoria et de l’empereur Napoléon, est une gloire à partager entre la France et l’Angleterre, et vous désirez savoir quelle est la quantité d’approbation que je crois pouvoir donner à cette victoire anglaise et française. »

Hugo de poursuivre : « ll y avait, dans un coin du monde, une merveille du monde ; cette merveille s’appelait le Palais d’été.(…) les artistes, les poètes, les philosophes, connaissaient le Palais d’été ; Voltaire en parle. On disait : le Parthénon en Grèce, les Pyramides en Egypte, le Colisée à Rome, Notre-Dame à Paris, le Palais d’été en Orient. Si on ne le voyait pas, on le rêvait. C’était une sorte d’effrayant chef-d’œuvre inconnu entrevu au loin dans on ne sait quel crépuscule, comme une silhouette de la civilisation d’Asie sur l’horizon de la civilisation d’Europe.
Un jour, deux bandits sont entrés dans le Palais d’été. L’un a pillé, l’autre a incendié.(…) Tous les trésors de toutes nos cathédrales réunies n’égaleraient pas ce splendide et formidable musée de l’orient. Il n’y avait pas seulement là des chefs-d’œuvre d’art, il y avait un entassement d’orfèvreries. Grand exploit, bonne aubaine. L’un des deux vainqueurs a empli ses poches, ce que voyant, l’autre a empli ses coffres ; et l’on est revenu en Europe, bras dessus, bras dessous, en riant. Telle est l’histoire des deux bandits ».
Et Hugo d’en tirer la conclusion suivante : « Devant l’histoire, l’un des deux bandits s’appellera la France, l’autre s’appellera l’Angleterre. L’empire français a empoché la moitié de cette victoire et il étale aujourd’hui avec une sorte de naïveté de propriétaire, le splendide bric-à-brac du Palais d’été.
J’espère qu’un jour viendra où la France, délivrée et nettoyée, renverra ce butin à la Chine spoliée.
En attendant, il y a un vol et deux voleurs, je le constate.
Telle est, monsieur, la quantité d’approbation que je donne à l’expédition de Chine. »

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