mardi 8 mars 2011

Le Procès Chirac: réponse à un lecteur



Le procès Chirac pose de nombreux problèmes assez difficiles. J’écarte tout de suite l’idée que Chirac serait vieux, malade, sympathique car tout cela n’a aucun sens. S’il est dans cet état c’est parce qu’il a tout fait pour que ce procès soit retardé, il ne faudrait pas qu’il bénéficie de tous ces procédés dilatoires.
Mais quand on a dit cela on n’a pas réglé tous les problèmes que pose ce procès.
Le premier est celui de savoir si l’immunité du Président de la République, pendant son  ou ses mandats, est une bonne ou mauvaise chose. Honnêtement ce n’est pas une question facile car permettre des poursuites pendant le mandat ce serait, de manière évidente, affaiblir la fonction même de Président. Quel image donnerait-il en France et à l’étranger s’il était poursuivi devant un Tribunal ?
Je pense donc que cette immunité temporaire est normale et l’on ne peut donc reprocher le retard pris à le juger.
En second lieu, il y a, dans cette procédure de nombreux participants et qui, tous ont usé des toutes les voies de recours que leur donnaient la procédure ce qui a entraîné des longueurs inhabituelles. L’avocat que je suis est convaincu que la procédure, c'est-à-dire précisément la faculté de faire des recours est une garantie du justiciable et que l’on ne peut  critiquer des personnes poursuivies qui se battent pour tenter d’échapper à la sanction. Le seul regret que j’exprime est que, ici comme dans beaucoup de domaines, les « riches » ont des moyens qu’hélas les « pauvres » n’ont pas et cela donne une image de justice à deux vitesses que je condamne et qu’un développement sérieux de l’aide juridictionnelle permettrait de diminuer un peu.
Enfin le dernier épisode qui risque, à l’heure où j’écris de faire une nouvelle fois renvoyer la procédure, pose une très intéressante question de droit.
On peut dorénavant soutenir devant un tribunal qu’une loi, sur la base de laquelle on est poursuivi, est contraire à la Constitution. Si la question posée est nouvelle (c'est-à-dire jamais réglée par le Conseil Constitutionnel) et sérieuse, le Tribunal doit renvoyer pour que la question soit effectivement tranchée.
Ici l’un des avocats de l’une des parties (pas Chirac) a posé une telle question à propos de la prescription de l’abus de bien social. Normalement en matière de délit, ce qui est le cas ici, la prescription est de trois ans à compter de la commission des faits. Or, en matière d’abus de bien social (pour résumé à l’extrême : corruption) les Tribunaux ont considéré que le délai de trois ans ne court pas de la date de commission des faits mais du moment où ces  faits pouvaient  être découvert parce qu’ils sont par nature cachés. Cette position des Tribunaux étaient très critiquées par le milieu politique et économique et la droite a tenté à plusieurs reprises de modifier cette règle sans y parvenir car, politiquement, cela fait tâche.
Il n’en demeure pas moins que la question posée aujourd’hui me paraît sérieuse et elle mérite cet examen par le Conseil Constitutionnel. A suivre donc et on peut lire l'analyse d'un autre avocat qui tient un blog absolument captivant qui figure d'ailleurs dans mes blogs favoris.

1 commentaire:

  1. Merci beaucoup.
    Je suis sûr que vous avez été un très bon professeur car votre pédagogie est généreuse.
    Je regrette que vous soyez à la retraite, car si j'avais besoin d'un avocat( ce qui pourrait arriver par les temps qui courent),j'aurais fait appel à vous.

    RépondreSupprimer