Je termine la lecture de « Meursault
contre enquête » de Kamel Daoud et je dois dire que, ayant commencé le livre, je n’ai pu le lâcher
qu’à la fin. Ecrit dans une langue superbe et il y a d’ailleurs, au passage,
dans ce roman un bel éloge de la langue française, ce fameux « butin de
guerre » que Kamel Daoud a su si bien exploité.
Mais c’est évidement le parti
de l’écrivain qui intéresse et nul ne pourra désormais lire l’Etranger de Camus
avec le même regard. Là ou Camus n’évoque que l « l’arabe » surgit un
homme dont le frère, très jeune, au moment ou l’Arabe est tué passe sa vie a essayé de chercher ce frère et
a le faire revivre. L’écrivain connaît
très bien l’œuvre de Camus, l’Etranger, bien sûr, mais aussi la chute puisque
ce frère de l’arabe fait son récit dans un bar sous forme d’une confession qui
n’est pas sans rappeler La Chute.
« Songes-y, c’est l’un
des livres les plus lus au monde, mon frère aurai pu être célèbre si ton auteur
avait seulement daigné lui attribuer un prénom, H’med ou Kaddour ou Hammou,
juste un prénom, bon sang ! »
« Ah, la plaisanterie !
Tu comprends maintenant ? Tu comprends pourquoi j’ai ri la première fois
que j’ai lu le livre de ton héros ? Moi qui m’attendais à retrouver dans
cette histoire les derniers mots de mon frère, la description de son souffle,
ses répliques face à l’assassin, ses traces et son visage, je n y ai lu que
deux lignes sur un arabe. Le mot « Arabe » y est cité vingt cinq fois
et pas un seul prénom, pas une seule fois. »
Il y a, aussi, dans ce beau
roman, des notations sur l’Algérie d’après l’indépendance, sur la place de la religion que le narrateur déteste, sur la régression des femmes dans ce pays.
Le narrateur a connu et aimé une femme qui a résisté a la pesanteur sociale,
une femme libéré comme il en existe, selon lui de moins en moins dans le pays.
S’inspirant du dialogue de l’Etranger condamné a mort avec le prêtre, il y a de
belles pages d’invectives, de cris contre cette religion qui veut s’insinuer
partout.
Au total un magnifique roman
qui a connu des critiques très positives
et qui devraient connaître, je l’espère, une grande diffusion en France. Souhaitons,
dès lors, que les Editions Barzakh fassent le nécessaire pour que ce récit
puisse trouver son lectorat en France. Je me rends compte qu'il ne sera disponible sur Amazon qu'en mai 2014. J’espère vraiment qu'alors on reparlera de ce beau roman.