Ronald Aronson, spécialiste de Sartre outre-atlantique a consacré en 2004 un important ouvrage aux rapports entre Sartre et Camus. Le livre est paru en France aux Editions Alvik en 2005 et cette somme nous donne à la fois le détail de l'amitié qu'il y eut entre les deux hommes et analyse en détail ce qui les opposait et qui a prie une énorme proportion dans le conteste de guerre froide qui régnait alors sur le monde et qui sommait chacun de prendre parti. Comme il le dit dans son prologue ce climat politique les a obligé, d'une certaine façon, a aller au del94)à même de leur réelles divergences. Sartre n'était pas tout a fait communiste et Camus n'était pas davantage un supporter du capitalisme mais les nuances de leurs pensées véritables étaient écartées au profit d'un affrontement frontal entre les deux idéologies. Telle est , semble t-il, la thèse de l'auteur.
Il y a d'abord une réelle amitié entre les deux et ce malgré les différences d'origine et de formations gens s'amusent beaucoup dans le Paris de l'époque. Mais avant même les différences d'idée il y a une différence évidente entre leurs deux façons d'écrire.
L'auteur écrit ceci qui est très juste: "Bien que les deux écrivains nous aient laissé des ouvrages philosophiques ou romanesques importants et qu'ils aient abordé avec succès des genres littéraires très variés, Sartre est, par tempérament, avant tout un philosophe voué à la théorie et aux idées générales, tandis que Camus est avant tout un romancier, plus à son aise dans la traduction de situations concrètes." ( p.30)
Une différence va aussi apparaître au moment de la guerre. Camus s'engage dans la Résistance alors que Sartre reste un peu en arrière. Il le reconnaîtra d'ailleurs dans un bel éloge du Camus de cette époque.
"Vous avez vécu un combat austère, sans gloire ou fanfare. Ses dangers n'étaient guère exaltants et pire vous avez pris le risque d'être dégradé et avili. Sartre a reconnu que Camus avait vécu cette histoire plus profondément et entièrement que bon nombre d'entre nous"
Sarre nous dit que Camus est devenu "la conjonction admirable d'une personne, d'une action, et d'une oeuvre."
On voit donc à la fois la réelle amitié ( un vrai coup de foudre selon Simone de Beauvoir) et l'admiration de Sartre pour Camus qu'il place dans la ligné des écrivains engagés (Voltaire-Zola)et dont il fait ,à cette époque le type même de l'écrivain engagé (p.94 ) et cela ne plait guère à Camus qui écrit cette phrase significative:" J'aime mieux les homes engagés que les littératures engagées. Du courage dans la vie et du talent dans ses oeuvres, ce n'est déjà pas si mal. Et puis l'écrivain est engagé quand il le veut. Son mérite c'est son mouvement. Et si ça doit devenir une loi, un métier ou une terreur, où est le mérite justement?" (p.95)
Ce livre contient aussi, évidement, un très long développement à la rupture entre les deux écrivains à la suite de la publication de L'homme révolté et l'on ne peut que prendre plaisir à lire les échanges très vifs mais magnifiquement écrits entre Jeanson, Camus et Sartre.
Le livre se termine sur l'opposition de Sartre et de Camus sur l'Algérie et là, on est bien obligé d'admettre que Sartre a eu raison contre Camus. L'auteur montre bien que si Camus était tout a fait en avance et très lucide dans les années 1938-1940 il ne réussira pas a prendre la réelle mesure de l'action du FLN et continuera de penser que des aménagements certes sérieux auraient pu suffire alors qu'il n'en est rien. .
Au total un livre très dense , très bien documenté et équilibré dans son jugement sur ces deux grands intellectuels.
Ce blog est consacré à mes coups de coeur dans l'actualité, dans la littérature et dans mes voyages
vendredi 16 février 2018
mercredi 14 février 2018
Alessandro Bresolin: Albert Camus: l'union des différences
Je commence la lecture d'un livre d'Alessandro Bresolin publié aux Editions Fédéralistes et intitulé : "Albert Camus:l'union des différences". J'ai commencé par la préface d’Agnès Spiquel, grande spécialiste de Camus dont je voudrai vous donner un extrait. On sait que Camus aurait souhaité pour l'Algérie une troisième voie et , notamment il a soutenu un projet fédéraliste. Voici ce qu'écrit Agnès Spiquel:
"On sourira et on criera à l'utopie comme, dans les années 1950 ,on a crié à l'aveuglement devant les tentatives courageuses des Libéraux qui, avec Camus, ont tenté de promouvoir une Algérie libérée de la colonisation mais plurielle et conservant un lien avec la France dans le respect et "l'union des différences". La troisième voie, qu'ils ont tenté de frayer entre les solutions de plus en plus extrêmes auxquelles recouraient les nationalistes et les colonialistes, n'était pas celle d'un juste milieu confortable pour la conscience-mais bien un choix résolu pour la liberté et pour la justice.LEUR ÉCHEC HISTORIQUE N’INVALIDE PAS LEURS CONVICTIONS POLITIQUES."
Pour le reste l'ouvrage contient une première partie consacrée à la question algérienne et à la position de Camus dans cette période cruciale qui va des années 30 à la fin de la guerre en 1945. Cette partie est une analyse très complète de la position ,notamment des algériens dont la plupart des partis ne souhaitaient pas , à l'époque, se séparer de la France mais voulaient une égalité de traitement.On suit l'activité importante de Camus à cette époque d'abord dans le cadre de son adhésion au parti communiste puis lorsqu'il en fut exclu. C'est l'époque où il se met au théâtre qu'il pense être un excellent moyen d'éducation populaire.
Un passage de cet ouvrage est également très intéressant lorsqu'il montre que les partis musulmans en Algérie ne se sont pas laissé prendre par les sirènes du régime de Vichy qui pensait les attirer à lui et a sa politique par son antisémitisme et par l'abolition du décret Cremieux. (p.84 et s) Ces partis furent loyaux à la France et à ses valeurs et cela explique leur profonde déception après la guerre.
L'auteur s'attache ensuite a montrer l'attachement que Camus avait pour l'Espagne dont il aimait les paysages, le caractère des espagnols qui ressemblait a ce qu'il était et son attitude politique à l'égard de la guerre civile. Il lutta toute sa vie contre le franquisme et eut honte de l'attitude de la France et de l'Europe face à Franco.
J'ai beaucoup apprécié ,aussi, la partie consacrée aux relations de Camus avec l'Italie et, notamment cette analyse de la réception du fascisme si différente dans un pays comme l'Allemagne et en Italie , ce qui confirme à Camus l'idée que dans les pays méditerranéens "la doctrine recule devant le pays" (p.114)
Et enfin l'auteur et c'est l'objet de son étude étudie les conceptions fédéralistes de Camus qui ont échoué, notamment en Algérie, entraînant le pays vers un nationalisme étroit et borné.
Au détour de cette étude on rencontre le poète Jean Senac (si injuste à l'égard de Camus ) et Assia Djebar qui, évoquant son appel pour une trêve civile écrit ceci;" Il est possible que ne se représente personne, dans le sillage de l'émouvant Camus de janvier 1956, qu'on ne trouve personne aujourd'hui, capable de prononcer, au milieu de l’arène, des mots semblables, d'une puissance qu'on espère supporter pour une dernière fois."
Et le livre contient aussi, à la fin, un entretien avec Catherine Camus devenu la gestionnaire de l'oeuvre de son père et qui parle notamment du projet de faire entrer Camus au Panthéon.
Au total un livre plein d'enseignements, riche d'analyse de l'oeuvre et des conceptions politiques de Camus.
"On sourira et on criera à l'utopie comme, dans les années 1950 ,on a crié à l'aveuglement devant les tentatives courageuses des Libéraux qui, avec Camus, ont tenté de promouvoir une Algérie libérée de la colonisation mais plurielle et conservant un lien avec la France dans le respect et "l'union des différences". La troisième voie, qu'ils ont tenté de frayer entre les solutions de plus en plus extrêmes auxquelles recouraient les nationalistes et les colonialistes, n'était pas celle d'un juste milieu confortable pour la conscience-mais bien un choix résolu pour la liberté et pour la justice.LEUR ÉCHEC HISTORIQUE N’INVALIDE PAS LEURS CONVICTIONS POLITIQUES."
Pour le reste l'ouvrage contient une première partie consacrée à la question algérienne et à la position de Camus dans cette période cruciale qui va des années 30 à la fin de la guerre en 1945. Cette partie est une analyse très complète de la position ,notamment des algériens dont la plupart des partis ne souhaitaient pas , à l'époque, se séparer de la France mais voulaient une égalité de traitement.On suit l'activité importante de Camus à cette époque d'abord dans le cadre de son adhésion au parti communiste puis lorsqu'il en fut exclu. C'est l'époque où il se met au théâtre qu'il pense être un excellent moyen d'éducation populaire.
Un passage de cet ouvrage est également très intéressant lorsqu'il montre que les partis musulmans en Algérie ne se sont pas laissé prendre par les sirènes du régime de Vichy qui pensait les attirer à lui et a sa politique par son antisémitisme et par l'abolition du décret Cremieux. (p.84 et s) Ces partis furent loyaux à la France et à ses valeurs et cela explique leur profonde déception après la guerre.
L'auteur s'attache ensuite a montrer l'attachement que Camus avait pour l'Espagne dont il aimait les paysages, le caractère des espagnols qui ressemblait a ce qu'il était et son attitude politique à l'égard de la guerre civile. Il lutta toute sa vie contre le franquisme et eut honte de l'attitude de la France et de l'Europe face à Franco.
J'ai beaucoup apprécié ,aussi, la partie consacrée aux relations de Camus avec l'Italie et, notamment cette analyse de la réception du fascisme si différente dans un pays comme l'Allemagne et en Italie , ce qui confirme à Camus l'idée que dans les pays méditerranéens "la doctrine recule devant le pays" (p.114)
Et enfin l'auteur et c'est l'objet de son étude étudie les conceptions fédéralistes de Camus qui ont échoué, notamment en Algérie, entraînant le pays vers un nationalisme étroit et borné.
Au détour de cette étude on rencontre le poète Jean Senac (si injuste à l'égard de Camus ) et Assia Djebar qui, évoquant son appel pour une trêve civile écrit ceci;" Il est possible que ne se représente personne, dans le sillage de l'émouvant Camus de janvier 1956, qu'on ne trouve personne aujourd'hui, capable de prononcer, au milieu de l’arène, des mots semblables, d'une puissance qu'on espère supporter pour une dernière fois."
Et le livre contient aussi, à la fin, un entretien avec Catherine Camus devenu la gestionnaire de l'oeuvre de son père et qui parle notamment du projet de faire entrer Camus au Panthéon.
Au total un livre plein d'enseignements, riche d'analyse de l'oeuvre et des conceptions politiques de Camus.
vendredi 2 février 2018
Ma chaîne Youtube
Je signale que je viens de créer une chaîne Youtube sur la quelle je poste des vidéos et qui sont donc accessibles en tapant dans le moteur de recherche de Youtube jpryf.
Je consacre cette série de vidéos sur Youtube a mes coups de coeur littéraires, é des critiques de livres, à des lectures de textes d'auteurs etc....
Après la présentation de ma chaîne un jeune lycéen a laissé un message et parce que j'avais évoqué Albert Camus m' a écrit : "Tant mieux parce que nous allons l'avoir au programme!" A la suite de ce message j'ai décidé de poster des vidéos sur la biographie et l'oeuvre de Camus et j'ai commencé, ce matin par son enfance et sa formation. Je continuerai pour exposer toute sa vie et pour , ensuite parler des oeuvres.
Ainsi avec ma page Facebook Les amis d'Albert Camus et ces vidéos sur Youtube je vais faire oeuvre pédagogique et inciter les jeunes et les moins jeunes à lire cet auteur déjà très connu.
Je consacre cette série de vidéos sur Youtube a mes coups de coeur littéraires, é des critiques de livres, à des lectures de textes d'auteurs etc....
Après la présentation de ma chaîne un jeune lycéen a laissé un message et parce que j'avais évoqué Albert Camus m' a écrit : "Tant mieux parce que nous allons l'avoir au programme!" A la suite de ce message j'ai décidé de poster des vidéos sur la biographie et l'oeuvre de Camus et j'ai commencé, ce matin par son enfance et sa formation. Je continuerai pour exposer toute sa vie et pour , ensuite parler des oeuvres.
Ainsi avec ma page Facebook Les amis d'Albert Camus et ces vidéos sur Youtube je vais faire oeuvre pédagogique et inciter les jeunes et les moins jeunes à lire cet auteur déjà très connu.