Le livre que vient de publier chez Arthaud Cécile Vargaftig « En
URSS avec Gide » est difficile à qualifier. Il porte en sous-titre :
« Mon journal » et il est vrai que l’auteur mêle tout au long des
pages l’évocation du voyage de Gide en URSS et l’analyse de sa propre vie et
surtout des rapports qu’elle a entretenu avec son père, communiste et poète.
Ce qui m’a attiré vers ce livre et ce pourquoi je l’ai lu c’est
évidemment parce que je voulais connaître davantage ce voyage que fit Gide en
URSS et sur ce point je n’ai pas été déçu.
On suit de très prés l’évolution de Gide sur la question du
communisme. ON sait qu’il a été fortement intéressé par la Révolution de 17 et
qu’il a regardé avec intérêt les objectifs affichés de ce mouvement avec lequel
il a « sympathisé ». Il a voulu croire et a cru à un meilleur
possible. Il a fait confiance.
A partir de là les autorités soviétiques, Staline en tête,
ont souhaité le faire venir en Russie et ont espéré que le « grand
écrivain » (Gide jouissait d’une énorme audience) apporterait son concours
et servirait la propagande du régime.
On suit dans le livre la préparation du voyage, on en apprend
sur ceux, parmi les amis de Gide, qui feront le voyage avec lui : Pierre
Herbart qui a l’initiative, Jef Last, Guilloux, Eugene Dabit. Georges Shiffrin,
Elisabeth Van Rysselberghe qui est l’épouse de Pierre Herbart mais aussi la
mère de la fille de Gide, Catherine.
Nous suivons les étapes de ce voyage qui commence mal par la
mort à Moscou du poète Maxime Gorki (assassiné ?) puis la mort d’Eugène
Dabit.
Très vite Gide se sent mal à l’aise, il perçoit la fausseté
de ce voyage où ce qu’on lui montre ne correspond pas à la réalité qu’il découvre.
Il est frappé par ce qu’il appelle la « dépersonnalisation », le
culte de la personnalité poussé à l’extrême, la naissance d’une nouvelle
classe. Il écrit : « ce que l’on demande à présent c’est l’acceptation,
le conformisme » et le conformisme, il est vrai, ce n’est pas pour plaire
à André Gide, l’homme libre !
L’ouvrage de Cécile Vargaftig met l’accent sur l’entourage homosexuel
de Gide (à part Louis Guilloux et Joseph Shiffrin) dans un pays qui lutte
contre cette « déviance ».
A son retour Gide écrira d’abord « Retour d’URSS » et
très vite après pour répondre à ses nombreux détracteurs : « Retouches
à mon retour d’URSS » et l’auteur cite cette phrase de Gide qui dit tout :
« tôt ou tard, vos yeux s’ouvriront ;ils seront bien forcés de s’ouvrir.
Alors vous vous demanderez, vous les honnêtes : comment avons-nous pu les maintenir
fermés si longtemps. » Oui Gide a raison : comment ?