Chacun a en mémoire le magnifique discours d’André Malraux
lors du transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon : « Entre
ici Jean Moulin avec les cendres de Victor Hugo et les Misérables, celles de
Jean Jaurès et de la Justice….. » et a aussi en mémoire la belle photo en
noir et blanc de Jean Moulin avec son chapeau et son écharpe noire !
Chacun sait qu’il fut un héros de la Résistance mais, là, avec le récit de
Daniel Cordier « Alias Caracalla » on entre dans la vie quotidienne
de ce héros à Lyon, à Paris et à Londres et, dans une certaine mesure dans
l’intimité du personnage.
Daniel Cordier qui nous a raconté, avec bonheur, son enfance
dans les « Feux de Saint-Elme » (qui devait faire partie d’Alias
Caracalla), évoque, ici, pour nous, les quelques années qu’il passa en qualité
de secrétaire de Jean Moulin, après avoir quitté clandestinement la France à
dix neuf ans pour rejoindre la Résistance. Ces années qui marquèrent si
durablement sa longue vie.
Dans ce gros livre de près de 1200 pages il évoque cette vie
clandestine loin des siens à Lyon d’abord puis à Paris. Il narre au jour le
jour cette vie à la fois un peu répétitive, complétement clandestine, les
difficultés de liaison entre les membres de cette résistance (il n’y avait ni portable,
ni internet et le danger était partout), les difficultés pour se loger, pour se
rencontrer sans risques et l’on voit s’organiser au fur et à mesure de notre
lecture la difficile union des groupes de résistants.
Cela pourrait être un peu fastidieux mais Daniel Cordier
réussit la prouesse de nous rendre tout cela captivant et de nous montrer au
travers d’actes banaux le courage et la détermination qui animaient ces gens et
la difficulté qu’il y eut à unir les mouvements de résistance très divers et
très soucieux de leur autonomie, même si elle nuisait à l’efficacité.
Mais il y a aussi l’analyse de ce rapport singulier avec son
« patron » dont jusqu’à la fin, si invraisemblable que cela nous
paraisse, il ne connaitra pas l’identité. On voit apparaître ainsi derrière le
héros connu un homme de culture, amateur d’arts et notamment de peinture
moderne et qui sera à l’origine d’une partie de la carrière de Daniel Cordier.
Le livre se termine par le drame de Caluire qui fut un drame
pour l’histoire mais aussi un drame personnel pour Daniel Cordier.
Daniel Cordier avait écrit une monumentale histoire de Jean
Moulin mais dans ce livre qui reçut le Prix Renaudot Essai en 2009 il nous
donne a voir une relation à la fois institutionnelle et personnelle et c’est
captivant.
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