samedi 17 juillet 2021

La victoire en pleurant de Daniel Cordier

 

Le dernier livre de Daniel Cordier « La victoire en pleurant » qui vient de paraître est la suite d’Alias Caracalla qui a eu un grand succès. Daniel Cordier a écrit ce livre dans la dernière partie de sa vie et peu avant son décès et il revient sur sa vie après la mort de Jean Moulin « Rex » qui fut son chef et pour lequel il eut une grande admiration et une grande amitié.

Ce livre se lit avec autant d’intérêt que le précédent et j’y ai retenu deux parties au milieu d’une foule d’évènements tenant à l’histoire.

J’ai d’abord aimé ce passage où, traversant l’Espagne avec des camarades pour continuer le combat et alors qu’il est à Madrid il passe deux jours a visiter le Musée du Prado. De son vivant Jean Moulin qui l’a un peu initié à l’art lui avait promis de lui faire visiter ce musée et, pendant que ses camarades visitent la ville, lui déambule dans toutes les salles du prestigieux musée et admire les nombreux chefs d’œuvre de la peinture espagnole. Il nous dit ses réactions devant ces œuvres dont beaucoup l’éblouissent. On sait que dans une autre partie de sa vie il fut marchand de tableaux et qu’il  a laissé une belle collection d’art moderne. Là ce sont les grands classiques qu’il admire et auquel il s’initie. Mais les blessures de la guerre ne sont pas loin et il éclate en sanglot devant les Tes de Mayos, les fusillés ui rappelant ,tout à coup, ses camarades disparus.

L’autre passage qui m’a intéressé est celui où il évoque sa rencontre avec Camus et Sartre. Adolescent il avait une admiration pour Sartre qu’il avait très peu lu. Lorsqu’il le rencontre il est ébloui par l’intelligence mais aussi par la gentillesse de Sartre qui, à un moment, souhaitera que Daniel Cordier l’aide à obtenir des fonds pour organiser un nouveau groupe de résistants. Sartre estime , en effet, que tous les autres groupes n’ont qu’un but : faire la guerre aux allemands mais que leurs participants ne réfléchissent pas assez a ce qu’il faudra faire après la victoire, au nouveau système à mettre en place. Sartre veut que son groupe tout en se battant soit un groupe qui prépare l’avenir idéologique pour l’après victoire et il croit ce point essentiel.

Cela m’a conduit a estimer qu’il y  avait là une différence assez fondamentale avec Albert Camus. La participation de Sartre à la résistance a fait débat, celle de Camus est incontestable.  Sartre reste un théoricien et l’essentiel pour lui est de réfléchir a un système pour après, Camus, lui, combat. Non pas qu’il ne réfléchisse pas, ses Lettres à un ami Allemand et ses chroniques dans Combat prouve le contraire mais il sait, lui, que la priorité absolue est d’abord de vaincre les nazis par les armes et qu’il sera alors temps de penser au régime a mettre en place.

J’aurai aimé évoqué cela avec Daniel Cordier lorsqu’il y a maintenant une vingtaine d’années je l’avais reçu dans mon Cabinet d’avocat à Pau. Mais, à cette époque je connaissais moins Camus et je n’ai pas eu  cette discussion qui eut été passionnante et je suis passé  à côté d’un homme à la vie passionnante.

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