Regis Jauffret vient de publier
aux Editions du Seuil : « Le dernier bain de Flaubert ».
Derrière ce titre ,un peu énigmatique se cache une sorte de biographie romancée
de l’illustre écrivain écrite dans un joli style et faisant s’exprimer Flaubert
lui-même.
Il nous peint le décor de son
enfance dans cet hôtel Dieu de Rouen avec un père chirurgien qui opère sous les
fenêtres de ses enfants, sa vie de famille, ses crises d’épilepsie depuis
l’adolescence et ses amours ,un peu particuliers avec des femmes (A peine adolescent avec Elisa Schlesinger)
puis Louise Collet et beaucoup de prostituées un peu partout, mais aussi avec
l’amour de sa vie Alfred Le Poitevin de cinq ans son aîné, Maxime Du camp et
Louis Bouilhet et quelques jeunes lors
du voyage en Orient. Il nous dit comment il a détruit presque toute la
correspondance amoureuse, notamment avec Alfred.
Il évoque ses lectures à haute
voix dans sa famille et chez ses amis et règle son compte au passage à la
théorie du « gueuloir » propre à améliorer le style.
Flaubert nous parle et nous
raconte comment ses personnages et bien sûr, Emma Bovary reviennent le visiter
régulièrement. A propos de ce roman il évoque le procès qui lui fût fait et son
acquittement dû , nous dit-il, à l’intervention de son frère auprès de Napoléon
III . Evoquant cette affaire il a des mots très durs pour les Juges et je
le cite :
« Napoléon III donna des
ordres.
Ils sont habitués à obéir ces
esclaves de la Loi, prêts à la trahir pour une promotion, une médaille et d’ordinaire
pour rien. Vos tribunaux pendant les périodes troubles obéissent aux pouvoir dictatoriaux comme après aux vainqueurs
d’iceux sans que leurs sbires aient fait amende honorable ou soient remplacés
par des propres. Sur ordre ils m’acquittèrent en hiver, au nom de la loi inique
ils castrèrent Les Fleurs du mal de six
poèmes au mois d’août.
Courbant l’échine devant
l’empereur le tribunal replâtra.
Le temps manquait pour
recommencer la besogne. On se borna a contredire les premiers attendus par un dixième
et un onzième bâclés en toute hâte reconnaissant qu’en définitive j’étais un
brave homme respectueux de ces valeurs que malmenait mon ouvrage qui pour
ordurier qu’il fût n’en avait pas moins été longuement et sérieusement
travaillé…………
Gredins.
Juges, procureurs, avocats de la
partie civile vous savez que votre descendance aura honte du crime l’esprit que
vous commettez en bande organisée. Prenez donc votre plaisir en hâte, bientôt
le temps vus accablera ,fera de vous des fripouilles.
-Des Pinard. »
Dans la deuxième partie Régis
Jauffret fait , une nouvelle fois apparaître Emma Bovary et il y a là une
longue diatribe de l’intéressée qui adresse des reproches à Flaubert pour
l’avoir, selon elle, maltraitée.
Et puis c’est l’agonie de
Flaubert, la mort est là, elle rôde, elle l'entoure, il l'a voit ,lui parle son décès, le chagrin de Guy de Maupassant, la cupidité de la nièce
Caroline et de son mari et l’enterrement.
Au total un livre remarquable,
particulier entre l’essai et le roman et dans un style éblouissant où l'on se régale de pépites presque à chaque page. Régis
Jauffret nous fait croire à ce Flaubert. A lire absolument en cette année Flaubert. Les critiques ne s'y sont pas trompés. Et voilà comment de son côté Régis Jauffret en parle.
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