La tristesse est un mur entre deux jardins est le titre
qu’ont donné Michelle Perrot et Wassila Tamzali à leur dialogue sur le
féminisme, la France et l’Algérie. Les deux participantes a ce dialogue sont
très connues, Michelle Perrot comme une immense historienne et Wassila Tamzali pour une grande carrière à l’UNESCO où
elle s’est occupé principalement du droit des femmes dans le monde. Inutile
donc d’insister sur le fait qu’elles étaient parmi les mieux placées pour
évoquer ces questions.
Pour ma part je connaissais surtout le très beau livre de
Wassila Tamzali : Une éducation algérienne.
Je dirai d’abord que ce dialogue se place a un certain niveau
et fait appel aux dernières connaissances de l’histoire, de la sociologie et,
de l’anthropologie et de la philosophie et qu’il est quelques fois d’un accès
peu aisé. C’est donc un livre qu’il fait lire la plume à la main en revenant
quelques fois en arrière pour mieux saisir ces pensées.
J’y ai trouvé cependant de quoi alimenter ma propre réflexion
notamment sur la question en Algérie où, depuis longtemps je me suis préoccupé
de l’évolution du droit des femmes. Je rappelle que dés 1999,lorsque j’ai
publié mon premier livre : Algérie, Algérie Que me veux-tu ? je l’ai
dédié « aux combats des femmes
algériennes nécessairement victorieux ». J’avais été, en effet, choqué
qu’après avoir participé à a guerre d’indépendance elles aient été ensuite
reléguées loin du pouvoir et de l’égalité des droits.
Finalement je ne retiendrai que cette page (une déclaration
de Wassila Tamzali) que je trouve parfaite et que beaucoup ( à gauche
notamment) devrait lire.
« Je me suis heurtée plus d’une fois au théorème de
Gödel, et particulièrement en essayant
de convaincre des islamistes de l’égalité et de la liberté des femmes, car il
m’était impossible de sortir de leur système ; dés que j’engageais le
débat, celui-ci se refermait sur moi. La première rencontre que j’ai organisée
sur la mise en perspective des textes onusiens et le droit musulman, c’était à
Tunis ,en 1988. J’avais été reçu par le doyen de l’Université de droit le
brillant Yadh Ben Achour. D’entrée de jeu, il me dit avec une certaine
mélancolie : « Vous n’arriverez à rien. » On ne peut discuter
avec eux ,ils sont dans un système et ils doivent y rester, sinon, ils ne
seraient pas islamistes. Il faut discuter en dehors du système de la pensée
islamique. Evidemment il a raison. Plus tard,
quand la question des islamistes est devenue centrale, j’essayai de
détourner mes amis et partenaires européens de l’idée de travailler avec les islamistes
modérés. L’islamisme modéré n’existe pas, les musulmans modérés, oui, ceux qui
acceptent, et ils sont nombreux, que les règles qui régissent les rapports des
sexes ne soient pas celles de l’époque du Prophète, des prophètes. Les
musulmans modérés sont laïcs. D’où ma conviction de la nécessité absolue, impérative de la
laïcisation des pays arabes et maghrébins. Seule la laïcité peut permettre et
laisser se développer une pensée féministe, une organisation politique
démocratique, une culture libre de tabous, et une recherche qui admettra enfin
que la Terre est ronde » (p.159)
J’apprécie chez Wassila Tamzali à la fois son universalisme
et le fait qu’elle montre bien que La France coloniale a violé ses propres
valeurs mais dit-elle : Il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain ».
C’est très exactement ce qu’a fait en Tunisie le Président Bourguiba.
Mais pourquoi ? Parce qu’il ne confondait pas la France coloniale qu’il
combattait avec les valeurs universelles
nées en France et surtout parce qu’il était un adversaire résolu de l’islamisme.
Or ce que je reprocherai à Wassila Tamzali c’est de ne pas mettre suffisamment l’accent
sur le rôle absolument essentiel et déterminant que l’Islam ,consacré religion
du pays, a joué sur le rejet des droits des femmes et qu’il joue encore aujourd’hui
en Algérie.
Elle nous dit que l’Algérie « révolutionnaire » d’après
l’indépendance a écarté les femmes ! Oui mais parce que derrière cette
façade révolutionnaire et d’ailleurs utopiste il y avait bien ancré déjà l’Islam et ses méfaits
sur le droit des femmes.
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