mercredi 31 octobre 2018

Robert Badinter: Idiss

La première fois que j'ai vu Robert Badinter c'était en 1974. J'avais participé à l'équipe de Madame Lazerges lors  de son agrégation et à la suite de l'épreuve nous nous étions retrouvé, si ma mémoire est bonne, au cabinet de Robert Badinter et Jean Denis Bredin. Puis j'ai suivi de loin sa carrière d'avocat,sa carrière politique et j'ai lu ses livres, notamment "L'abolition" et " L’exécution"deux ouvrages magnifiques sur son combat contre la peine de mort. Autant dire que j'ai une immense admiration pour cet homme et ses combats.
Robert Badinter vient de publier aux Editions Fayard Idiss un livre d'hommage a sa grand mère maternelle et voilà que ,grâce a ce livre, j'entre dans l'intimité de cet homme. L'histoire intime ,mêlée à la grande et tragique histoire, nous fait découvrir un monde oublié, celui d'une partie des juifs d'Europe centrale ,obligés de fuit leur pays (ici la Bessarabie ) en raison d'un antisémitisme d'Etat et en raison des persécutions et des pogroms. Tout cette partie ,tragique , de la vie de sa grand mère Idiss est très bien racontée avec, au milieu des difficultés, ses joies et ,notamment son mariage d'amour et la naissance de ses enfants : deux fils et une fille, Charlotte, la mère de Robert Badinter.
Puis vient le grand départ et l'arrivée à Paris de cette famille pauvre. On mesure les difficultés mais , aussi, le répit car s'il existe , a cette époque un antisémitisme en France,  ce n'est rien par rapport a celui que cette famille a fui.
S'ouvre alors une période heureuse , seulement marquée pour Idiss par la mort de son mari adoré, et où la famille prend peu à peu sa place, travaille et il y a de belles pages sur l'enseignement, sur l'instituteur M.Martin (Le monsieur Germain de Camus) sur le lycée et les prix reçus par Robert et son frère Claude.
Puis, de nouveau le drame de la guerre, les vexations de l'odieux régime de Vichy et le départ vers la zone libre. Ce départ donne lieu a des pages bouleversantes, la mère de Robert Badinter étant déchirée à l'idée de devoir quitter sa mère atteinte d'un cancer pour rejoindre, avec ses fils, son mari en zone libre. Et le livre se termine par la mort d'Idiss dans son appartement à Paris, entouré de son seul fils.
Voilà qu'avec ce livre il me semble connaître un peu mieux Robert Badinter et la sensibilité qu'il y montre, me le fait admirer, encore un peu plus, si cela est possible. Et voici ma video sur ce livre et aussi cet entretien accordé à l'Express par l'auteur et, enfin.

mercredi 24 octobre 2018

Samama Chikli

Une amie en provenance de Tunisie vient de m'offrir un beau livre paru en 2000 aux Editions Simpact et consacré à : "Semama Chikli: un tunisien à le rencontre du XX° siècle." C'est essentiellement un livre de photos anciennes puisque l'homme dont il est question est un des pionniers en la matière et qu'il s''est intéressé ,non seulement à la photo, mais a toutes les inventions que le siècle voyait apparaître. Ce juif tunisien ,issu d'une famille venant de l'Andalousie au moment de la Reconquista, faisait partie de la bourgeoisie riche (son père était avait un poste important auprés du Bey) et l’intéressé fut également ami d'un Bey et partagea avec lui la passion pour cette technique et cet art naissant.
Il eut une jeunesse aventureuse et fit de nombreux voyages très loin de la Tunisie et il ,n'est , dés lors ,pas étonnant que son épitaphe au Cimetière Borgel ou il est enterré  dise " Inlassable dans la curiosité, téméraire dans le courage, audacieux dans l'entreprise, obstiné dans l'épreuve, résigné dans le malheur, il laisse des amis »
Il est considéré comme un des premiers cinéaste de Tunisie.
Livre passionnant donc et qui nous fait revivre cette Tunisie si ouverte et ou a communauté juive était parfaitement intégrée et se considérait comme Tunisiens à part entière. Comme tout cela a ,hélas ,bien changé sous les coups de l'histoire et de la politique.
Le MUCEM de Marseille lui a rendu récemment hommage en diffusant un documentaire sur cet homme

mercredi 3 octobre 2018

David Diopp : Frères d'âme

C'est un roman puissant et , d'une certaine manière éprouvant, que vient de publier David Dopp aux Editions du Seuil. C'est un premier roman et il est déjà sur de nombreuses listes de prix et reçoit une critique positive.( Voir celle de Tahar Benjeloun ) et encore et enfin voilà sa présentation par l'auteur
Nous sommes pendant la première guerre ,la grande boucherie de 14-18 et le romancier nous parle de ces soldats africains, ici sénégalais, qui ont combattu dans l'armée française et dont le courage a été maintes fois souligné mais aussi la férocité au point que l'armée les employait pour terroriser l'ennemi.
Mais comme nous sommes dans un roman ce ne sont pas de grandes batailles qui sont décrites même si quelques notes campent bien le décor terrible,la boue et le sang, mais plutôt les états d'âme d'un soldat sénégalais.Le roman débute le jour où ce soldat perd son compagnon, son "plus que frère"dans des conditions atroces, éventré, les tripes sorties du corps et dans d'affreuses douleurs. Cet ami, ce "plus que frère" demande au soldat de le tuer pour lui éviter la souffrance et  l'indignité. Il ne le fera pas et la première partie du livre est consacrée aux remords de ce soldat qui n'a pas achevé son camarade malgré ses supplications au nom de je ne sais quel devoir.
"Ah Mademba Diop! Ce n'est que quand tu t'es éteint que j'ai vraiment commencé a penser. Ce n'est qu'à ta mort, au crépuscule, que j'ai su, j'ai compris que je n'écouterais plus la voix du devoir, la voix qui ordonne, la voix qui impose la voie. mais c'était trop tard."
Accablé par ce qu'il n'a pas fait il va devenir un soldat plus féroce encore et va vouloir faire "payer" la mort de son ami et dans les combats il s'en prendra aux ennemis qu'il éventrera et dont il ramera le fusil et la main coupée.
Il va finir par faire peur même a ses coreligionnaires qui le prendront pour un sorcier!
Ce livre est donc un roman sur les horreurs de la guerre, un de plus, mais original et j'ai aimé la façon dont l'auteur nous dit les deux formes de folie dans ce genre de guerre: la folie qu'il faut aux soldats pour sortir des tranchées et se lancer sous la mitraille, sachant que beaucoup ne reviendront pas et l'autre folie, la permanente celle du héros du roman.
Son comportement fait tellement peur qu'il est renvoyé , en permission, à l'arrière pour y être soigné. Et cette deuxième partie du roman est l'occasion pour lui de se souvenir de sa vie avant la guerre dans son petit village du Sénégal, de ses parents, de ses voisins et de la famille se de son ami "plus que frère" qui l'adopte lorsque sa mère quitte son père. Cette partie du roman est pleine de douceur et contraste avec la première mais se termine mal car , si j'ai bien compris, il tue la fille du médecin qui le soigne. Les horreurs de la guerre l'ont complètement détruit. Ce livre qui figurait dans la liste de nombreux prix a finalement obtenu le Goncourt des lycéens et il a eu droit a une belle remise du prix à l'Elysée.

jeudi 20 septembre 2018

Albert Camus ou le triangle brisé de Khalifa Yahia

J'ai laissé pour la fin la lecture de ce volumineux livre qui se trouvait dans l'envoi de mon ami Lakhdar et qui a été édité en 2015 aux Editions ENAG à Alger. Je dois dire aussi que j'allais vers ce livre avec un peu d'appréhension car il s'agit, un peu remanié , d'une thèse de "psychologie clinique"soutenue à l'Université d'Alger en avril 2006.
J'étais heureux que dans cette Université qu'il avait fréquenté Camus soit un tel objet d'études mais le côté "clinique" et l'appel non pas à la simple psychologie mais à l'analyse , en réalité , de l'inconscient  répugnait un peu à mon sens de la rationalité et à ma méfiance, sans doute par ignorance!des théories de l'inconscient.
Le livre est , en tous cas, le résultat d'un très important travail et l'auteur avant de se lancer dans ses thèses proprement dites, a bien situé Camus et son oeuvre dans la littérature algérienne de cette époque et il a fouillé complètement la biographie de cet écrivain, n’omettant vraiment aucun événement de sa vie. J'ai donc retrouvé presque tout ce que les biographes (nombreux) ont retenu de sa vie.
J'ai apprécié toute la partie sur la recherche par Camus d'un "père de substitution" puisque le sien était mort à la guerre et qu'il ne l'a pas connu. L'auteur dénombre quatre père de substitution:
l'oncle Etienne, l'instituteur monsieur Germain, Jean Grenier son professeur de philosophie et son oncle Arcaute qui l'a accueilli lorsqu'il est devenu tuberculeux. Rien à dire sauf deux choses qui me paraissent excessives et des extrapolations. la première c'est que l'oncle Etienne n'aurait pas bien rempli son rôle car il était unijambiste et donc ,nous dit le psychologue, "castré"! Il faudra que l'on explique davantage!
L'autre remarque c'est que ce clinicien tire des analyses qui me paraissent( peut-être ai-je tort) douteuses lorsqu'il écrit ,par exemple p.128  "Il est présent (le père)"dans ce souhait formé par Meursault qu'il y ait beaucoup de spectateurs le jour de mon exécution et qu'ils m’accueillent avec des cris de haine" En disant cela nous dit l'auteur, ne souhaite t-il pas voir parmi ces spectateurs son père venu assister à son exécution comme il l'avait déjà fait en assistant à l’exécution d'un autre condamné à mort.?"N'est-ce pas tiré un peu par les cheveux comme on dit familièrement!
Et, enfin , je vois pas bien ce qui lui permet de dire (p.128) "En somme, nous sommes en mesure d'affirmer que , à travers les oeuvres suscitées et à travers les figures de nombreux substituts paternels et celle du père réelle, l'imago paternelle prédominante est celle du Père mauvais et non pas du père bon."
Il va , ensuite , procéder à l'analyse de divers essais de Camus extraits de L'envers et l'endroit et dans un premier temps il décrit et dénombre les thèmes contenus dans ces essais: le silence, la solitude, la mort, l'indifférence des autres, l'étrangeté du monde et des hommes, l'immobilité et c''est très intéressant. Par contre j'ai , ensuite, du mal a suivre lorsqu'il essaie d'expliquer par la "psychologie clinique" ces thèmes.
Il poursuit sur le même mode son analyse des autres oeuvres de Camus et les mêmes thèmes reviennent et il les dénombre. Il accomplit ce travail pour La mort heureuse, l'Etranger,La peste, Les Justes,La chute.
Dés lors si je n’adhère pas aux conclusions sur le plan de la psychologie clinique je trouve que ce livre est très utile car il permet a qui s'intéresse à l'oeuvre de Camus de retrouver recenser les thèmes fondamentaux de l'oeuvre, ceux que l'on retrouve , sous des formes différentes , dans tous les écrits de l'auteur.

lundi 17 septembre 2018

Camus-Amrouche: Des chemins qui s'écartent

Parmi les livres offerts par mon ami Lakdhar se trouve celui de Rejane Le Baut spécialiste de l'oeuvre de Jean Amrouche et consacré aux relations entre Camus et cet intellectuel et hommes de lettres et de radio qu'était Jean El Mouhoud Amrouche. Ce livre intitulé Camus-Amrouche: des chemins qui s'écartent a été publié en 2014 aux Editions Casbah à Alger et il est tout a fait passionnant. Il faut rappeler que Jean El Mouhoud Amrouche que je connaissais un peu car il est un grand amateur de l'oeuvre d'André Gide ( on connaît de lui des entretiens radiophoniques avec quelques grands écrivains du XIX° siècle) était comme il le disait lui-même "un monstre" dans cette Algérie coloniale. En effet , Kabyle il appartenait a une famille christianisée et ces conversions avaient entraîné la mise à l'écart de la famille dans leur petit village de Kabylie et une division nette de cette famille.
Jean Amrouche était donc quelqu'un de très à part et ce qui fait l'intérêt de ce livre c'est qu'il montre que malgré cette situation il a toujours milité pour l'indépendance contrairement à Camus et il a dit clairement que l'Algérie serait un pays arabe et musulman.On peut toujours conjecturer pour savoir s'il aurait eu la même position en sachant comment allait naître l'islamisme et en sachant les dérives du pouvoir, mais une chose est certaine c'est que lui le chrétien avait compris que l'indépendance était nécessaire.
Il va donc y avoir tout un dialogue entre Camus et Amrouche. Amrouche est plus âgé que Camus de quelques années mais l'on sent le grand respect qu'il porte à Camus, ce qui ne l'empêche pas de contester les positions de Camus et finalement de rompre un peu le lien qui les liaient.

dimanche 16 septembre 2018

Salim Bachi : Le dernier été d'un jeune homme

Un ami vient de m'offrir plusieurs livres évoquant, chacun a sa manière, l'oeuvre et la vie d'Albert Camus. Parmi eux celui publié en 2013 par Salim Bachi  "Le dernier été d'un jeune homme". Ce roman , car c'est un roman est construit à partir de la biographie de Camus telle qu'elle nous  a été livrée ,à plusieurs reprises, par de nombreux biographes. L'auteur puise dans ces biographies une quantité d’éléments (vrais) qu'il assemble de manière romanesque.
J'aime d'abord le titre qui évoque un moment de bascule , la fin d'un monde et pour Camus qui a tant aimé l’été à Alger ,le dernier été a quelque chose d'évidement douloureux.Ce dernier été c'est celui où il est amené à quitter l'Algérie qu'il ne reverra que quelques jours à chacun de ses brefs voyages.Il vivra désormais en France où il ne se considérera jamais chez lui sauf lorsqu'il pourra acquérir, grâce a René Char, sa maison de Lourmarin?
L'auteur part d'un voyage effectué par Camus vers l'Amérique latine. Il est sur le bateau et il repense a sa vie et des flashes reviennent a sa mémoire alors qu'il regarde l'océan où qu'il se repose dans sa couchette. Tout est écrit à la première personne. On entend Camus et l'auteur utilise d'ailleurs des phrases entière tirées de l'oeuvre. Certains lecteurs auront déjà presque tout lu mais ,là, c'est Camus qui pense , qui dit, qui s'exprime.
Une assez grande partie évoque la maladie qui a frappé Camus à l'age de 17 ans la tuberculose, cette maladie grave à l'époque  et il décrit très bien la souffrance ressentie ,à la fois physique et morale et qui poursuivra Camus toute sa vie.
On suit aussi son premier mariage avec Simone Hié et les difficultés qu'il rencontre, cette jeune femme étant accroc à l'héroïne.
J'ai beaucoup aimé aussi le dialogue avec Ouzegane sur la position du Parti communiste. Cela donne vie a ce qui était une querelle idéologique.
C'est un roman de formation et l'on retrouve tout ce qui a fait Camus:la pauvreté, la maladie, la mer et le soleil d'Algérie, les femmes et la littérature. Installé en France dans la grisaille de Paris il n'aura plus qu'a creuser, approfondir les intuitions qu'il a eu sous le soleil d'Alger.

samedi 25 août 2018

L'or de Blaise Cendrars

Une amie vient de m'offrir L'or de l'écrivain suisse Blaise Cendrars et j'ai commencé par la préface de Francis Lacassin qui est une réflexion sur les rapports de l'histoire et de la littérature, sur un travail universitaire et une oeuvre littéraire. C'est une question que j'avais déjà rencontré lors de mes lectures de Mémoires d'Hadrien de Marguerite Yourcenar. Blaise Cendrars raconte, à sa manière, la vie du Général Sutter qui fut celui qui rattacha la Californie, autrefois dirigée par les Espagnols aux Etats Unis d'Amérique et qui très riche fut ensuite ruiné par la découverte de l'or dans cette contrée. Des universitaires ont raconté cette histoire et ont donné mille détails mais c'est Blaise Cendrars qui a fait revivre  ce général tout en commettant mille petites erreurs factuels. Dans les travaux universitaires le Général Sutter succombe sous les détail et revit dans le roman de l'écrivain suisse.
Le roman quant à lui est une épopée et l'on suit ce Sutter venu de sa Suisse natale en Amérique et qui va conquérir la Californie. Quant on connaît un peu , ne serait-ce que par les photos la Californie d'aujourd'hui on a du mal a imaginer ce qu'était ce territoire lorsque Sutter l'aborde. On ne peut qu'admirer son énergie , son intelligence des situations et des hommes dans cette contrée où tout est à faire. L'amie qui m'a offert ce livre m'a dit en me le donnant qu'il évoquerait ,pour moi, les ancêtres Suisses partis aussi en Algérie un peu comme des pionniers et qui sont arrivés dans un Setif où tout était à construire. Lisant le roman de Blaise Cendras je mesure, en effet, ce qu'il leur a fallu de courage, de persévérance , de lutte permanente pour arriver a créer les domaines qui furent ceux de la  Compagnie Genevoise des colonies Suisses de Sétif et encore dans ce lien une histoire plus complète
Mais dans le roman ce qu'il y a de tragique c'est que toute l'oeuvre accompli par Sutter allait lui être arrachée par la découverte sur ces terres de l'or. Aussitôt ce fut la ruée d'une foule innombrable.
Le roman revient sur les péripéties de cette vie extraordinaire, sur le procès qu'il intente pour faire reconnaître ses droits sur les terrains sur lesquels s'est bâtie la ville de San Francisco. Il gagne ce procès mais cela ne lui servira a rien car il ne sera jamais exécuté.
On assiste à ses dernières démarches auprés des autorités. C'est un viel homme qui a perdu toute sa famille et qui passe maintenant pour un fou.
Il meurt en 1830 et il ne lui reste absolument plus rien de la prodigieuse fortune qu'il avait réussi a se constituer.
Le roman est passionnant et peu importe si l'auteur a pris de nombreuses libertés avec la réalité. Je pense que l'on prend mieux la mesure de cet individu hors du commun dans ce roman que dans les biographies savantes qui lui ont été consacrées.


mardi 21 août 2018

La corrida

Deux entrées récentes sur Facebook m’ont fait réagir. La première évoque un entretien avec un « philosophe » dans un journal du midi dans lequel il défend la corrida et la rédaction lui fait dire que « supprimer la corrida serait un assassinat » rien de moins !
La seconde entrée évoque, photo à l’appui, la présence de l’évêque de Bayonne dans son habit de cérémonie à une corrida.
J’avoue que j’ai réagi, assez vivement, a ces entrées mais, dans le fond sur un mode émotionnel puisque je suis résolument hostile à la corrida depuis toujours.
J’ai voulu dépasser ces réaction spontanées et émotives et réfléchir, de nouveau , à la question et je dois avouer que je n’ai pas trouvé un seul argument qui puisse justifier ces cruautés infligés sans utilité à des animaux.
Reprenons les arguments des partisans de cette cruauté.
Il y a d’abord et toujours mise en avant le respect de la tradition et d’ailleurs la loi Gramont justifie la corrida dans quelques lieux en France au nom d’une « tradition durable ».
Pour moi cet appel à la tradition ne vaut absolument rien. La progrès moral des peuples et le progrès tout court s’est toujours fait en rompant avec les traditions anciennes héritées de temps d’ignorance. Dans la Rome antique et ailleurs les jeux du cirque qui mettaient en jeux la vie d’animaux mais aussi d’hommes constituaient une solide tradition. Elle a été heureusement mise à néant parle progrès des peuples. Qui le te contesterai aujourd’hui ?
Dans certains pays la tradition est d’exciser les petites filles. Doit-on au nom du respect dû à la tradition l’accepter ? Evidemment non.
Il n’ y a guère , dans nos campagnes ,la femme ne s’asseyait pas a table et servait le mari. Devait-on respecter cette belle tradition ancienne ?
Malgré l’absence de texte juridique aucune femme n’a été ,très longtemps, admise à l’Académie française au nom de la tradition. Aurait-il fallu continuer ?
Marguerite Yourcenar (qui au passage était résolument hostile à toute souffrance animale) qui fut la première a être admise à l’Académie a évoqué, avec une forme d’ironie ,la place de la tradition dans son magnifique discours de réception
« D’autre part j’ai trop le respect de la tradition, là, où elle est encore vivante, puissante et, si j’ose dire, susceptible, pour ne pas comprendre ceux qui résistent aux innovations vers lesquelles les pousse ce qu’on appelle l’esprit du temps , qui n’est souvent je le leur concède, que la mode du temps……. » et après avoir donné son coup de chapeau aux vieux académiciens elle s’attarde sur toutes les femmes qui auraient dû recevoir avant elles cet honneur !
Par conséquent ce premier argument de la tradition est absolument sans portée ,il n’est que le conservatisme, le dogmatisme semblable a celui des Eglises et qui a été, fort justement combattu.
Le second argument des partisans est le recours à l’esthétique, à la beauté du spectacle dans le sable, sous le ciel bleu et au milieu d’une musique a flonflon et dans le rouge et jaune des couleurs de l’Espagne ! Et cette beauté devrait selon eux faire oublier la cruauté non pas seulement de la mort qui n’est qu’un mauvais passage mais de tout ce qui précède : la cruauté des engins destinés a meurtrir la chair du taureau, a faire ne sorte de le stresser au maximum. Ah vraiment elles sont belles, en effet les piques semblables a d’horribles hameçons qui s’enfoncent dans les chairs mais qui, il est vrai sont si joliment surmontés de décorations rouges et jaunes 
Ces mêmes qui admirent l’esthétique de la corrida s’offusquent, sans doute et pince le nez, quand on évoque Céline et son antisémitisme écœurant Mais la beauté du style ne devrait-elle pas justifier à leurs yeux les pires ignominies!
En conclusion je ne pense pas que la beauté ou la jouissance que donne un spectacle puisse justifier la cruauté et la souffrance animale. Une telle beauté est salie et n’est plus la beauté.
Je rappellerai que l’on connaît des assassins qui jouissent de la souffrance de leurs victimes et il ne viendrait à l’idée de personne de justifier leur crime par la jouissance qu’ils en obtiennent
Il y a, enfin, deux derniers arguments : l’argument économique et celui prétendument « écologique ».
L’argument économique est d’ailleurs celui qui a le plus de succès et notamment auprès des élus. La corrida est, en effet, une affaire à la fois pour ses divers participants et pour les endroits où elle se déroule. Cela est indéniable. Mais cet argument peut-il justifier la souffrance infligée ?
Je rappellerai seulement que l’esclavage des noirs d’Afrique a été une grande affaire économique, et qu’il a enrichi des familles et des villes a un point assez difficile a imaginer. Aurait t on dû maintenir l’esclavage pour autant ? Évidement les taureaux ne sont pas des hommes et ils ne peuvent ni se révolter ni se plaindre.
Enfin il y a le dernier argument hypocrite et cynique qui se voudrait écologique ! 
Faute de corridas on n’élèvera plus de taureaux de combats et ces magnifiques animaux n’existeront plus ! Et puis, pensez y ,certes il meurt dans l’arène mais auparavant ils ont eu une vie de rêve dans les prés verts. Mais que ne les laisse t on pas terminer leur vie dans les prés verts si on se soucie tant de leur bien être ? Et puis s’ils ne viennent pas au monde qu’elle importance et ne doivent-ils y venir ,dans ce monde, que pour justifier que quelques hommes se repaissent du spectacle de la cruauté et de la mort. Belle raison en vérité !
Enfin qu’un évêque assiste en grande tenue à une corrida cela peut , en effet ,choquer mais cela n’étonnera pas ceux qui savent que l’Eglise peut faire bien pire et n’a t on pas vu, en Espagne l’Eglise d’Espagne bénir les fusils qui allaient tuer les républicains !

En conclusion je dirai que j'adhère entièrement a cette phrase : "

"La tauromachie est l'art scélérat et vénal de torturer et de mettre à mort des animaux (...), elle est une fête de la douleur et de la mort.
En cela, la tauromachie constitue un défi majeur à la morale, à l'éducation, à la science et à la culture."
Alfred Kastler

vendredi 10 août 2018

Fatrasies de Jacques Rouviere

Des amis m'on prêté un petit livre édité par Jacques Rouviere aux éditions de la Société des écrivains. Ils me l'on prêté parce que c'est une forme d'édition qui pouvait m’intéresser mais je dois dire que j'ai pris plaisir à lire ce livre.
D'abord j'ai appris ce que signifiait "Fatrasies" car je dois bien avouer que je n'avais jamais rencontré ce mot et j'en ignorais ,évidement, le sens. Au moyen-âge nous dit l'auteur les "fatrasies" comme les "fatras" étaient des poèmes en vers rigidement codifiés dans la forme, par opposition avec le fond, volontiers plus libre.
Le livre se compose de petits récits très variés mais qui tous sont écrits avec humour. On s'amuse mais on apprend aussi et le mérite de ce genre d'ouvrage c'est que vous pouvez le prendre  à tous moments et n'importe où.
Il y a de nombreuses petites pièces charmantes comme par exemple "Les funérailles de l’Évêque de la Garenne-Bezons (p.13), "Esprit es-tu là?!" (p.15) ou encore "Lettres de noblesse" (p.41) et enfin " La preuve de l'existence de Dieu" (p.61) de petits morceaux ciselés et qu'on lit en riant.
Enfin je noterai ce "Sonnet a quatre mains" où chaque vers est d'un poète différent et qui donne un ensemble très homogène. Le lecteur aurait du mal, sans la solution que donne l'auteur a reconnaître des poètes différents a chaque vers! (p.31)
Au total ce livre fait passer un bon moment et il est de ceux que l'on devrait emporter  pour un voyage en train ou en avion ou pour se distraire en vacances au bord de sa piscine.

mardi 24 juillet 2018

Théorie d'Alger de Sébastien Lapaque

Je viens de découvrir un petit livre (une centaine de page) publié en  chez Actes Sud et les éditions Barzach par Sébastien Lapaque: "Théorie d'Alger" qui est un chant d'amour pour la ville d'Alger et j' y ai retrouvé beaucoup de mes propres sensations lors de mon voyage en 2016.
Voici une petite video dans laquelle l'auteur nous explique comment lui est venu l'idée d'écrire ce livre.
Ce petit livre évoque l'Alger d'aujourd'hui qu'arpente l'auteur et l'Alger d'hier à l'histoire mouvementée.Il nous fait connaître le petit peuple d'Alger et évoque des rencontres avec des algériens âgés qui lui racontent l'histoire de cette ville que ce soit des "taxistes" d'un certain âge (car les jeunes sont de plus en plus barbus et muets) ou des rencontres de bar, notamment dans le seul bar où il est possible en dehors des hôtels de luxe de consommer de l'alcool!
IL a des discussions passionnées avec des algériens sur le cas de Camus qui n'est pas encore totalement réglé!
Il parcourt les lieux emblématiques de la ville, le jardin d'Essai, le Musée des beaux arts avec ses magnifiques orientalistes( notamment Dinet), les rues si connues l'ex rue Michelet, l'ex rue d'Isly!
Il y a , aussi, un passage émouvant lorsque l'auteur est à la recherche de la tombe de la mère de Camus la veuve Sintes. Il va d'abord, sur une fausse information à Marengo (Hadjout) le village de l'Etranger puis au cimetière de l'ancien Boulevard Bru sur les hauteurs de Bellecourt, le cimetière d'El Madania et c'est l'occasion de pages émouvantes que je recopie ici.
"Il revint au cimetière chrétien d'El-Madania en avril, sous un ciel bleu et un soleil superbe. C'était très tôt, un dimanche matin,dans un calme absolu à peine troublé par le roucoulement des pigeons. A cette heure de la journée,la vue sur la mer dorée, qui se confondait avec le ciel,était somptueuse. Prêtre de la Mission de France et directeur du centre d'études diocésain Les Glycines à Alger, le père Guillaume, habitué à guider les chercheurs venus du monde entier en pèlerinage sur les traces de Camus, lui avait enfin indiqué où se trouvait la tombe de sa mère. Sûr de son fait cette fois-ci, il avait à nouveau acheté un rosier en pot.
La tombe de mère de Camus est tout en bas du cimetière contre le mur d'enceinte, au milieu de la rangée",lui avait indiqué le père Guillaume. En descendant vers l'endroit indiqué,il observa la différence entre les monuments édifiés à l'entrée de la nécropole, sur les hauteurs ,et la modestie des tomes aux noms souvent effacés qu'on découvrait en bas. Pour trouver la tombe de la mère de Camus,il se fraya un chemin au milieu des herbes folles et arracha les plantes qui poussaient entre les stèles. Il était absolument seul dans le cimetière. Par delà le mur d'enceinte, la vue sur le port était grandiose, avec le quartier de Belcourt en bas sur sa droite et à gauche l'hôtel Aurassi,la place des Martyrs et à la Casbah.
Il trouva enfin ce qu'il cherchait. Une plaque de béton grise, ornée d'une croix, brisée en deux, avec une plaque de marbre portant ces simples mots:

                                          Veuve Lucien Camus
                                        Née Catherine Sintes
                                              1882-1960

La mère d'Albert Camus était donc morte avant l'indépendance de l'Algérie, la même année que son fils, huit mois après ainsi qu'il l'apprendrait en consultant les registres. "C'est trop jeune" avait-elle dit en apprenant l'accident de la route qui avait coûté la vie à l'écrivain. Elle ne lui avait pas survécu très longtemps. Il déposa délicatement son rosier su sa sépulture abandonnée et dit une prière  en songeant a tous ceux qui , de l'autre côté de la Méditerranée,continuaient,de vivre grâce à l'oeuvre de Camus
 ses ayants droits, son éditeur, sans jamais s'être souciés d'honorer la mémoire de la femme qui lui avait donné le jour en entretenant sa tombe. (p 87-88 )"
L'auteur avoue qu'il aime se promener dans les cimetières et je m 'y retrouve tout a fait moi qui ait raconté plusieurs fois mes promenades dans de nombreux cimetières ,ici où là.
Il y a ,aussi, un très bel éloge d'Etienne Dinet et, enfin ,j'ai beaucoup aimé les dernières pages et sa manière de remercier tous les algériens qui l'ont si bien accueilli.
A lire par tous ceux qui connaissent et sont nostalgiques d'Alger et aussi par ceux qui ne connaissent pas cette ville.

mercredi 11 juillet 2018

Philosophie de Camus


Je vous propose un petit texte, résultat d'un travail d'été sur la 
                 PHILOSOPHIE  DE CAMUS


On sait que l’un des procès qui ont été fait à Albert Camus dans les années 50 par l’intelligentsia parisienne était celui de ne pas être un véritable philosophe et l’on se souvient de l’imbécile apostrophe « philosophe pour classe terminale » qui voulait dire le mépris des intellectuels de l’époque pour cet écrivain venu d’Algérie.
Alors il est vrai que Camus a une faible formation universitaire en philosophie et qu’il n’a pas fait « Normale Sup ». Ila un simple diplôme d’études supérieures obtenu à Alger sur un mémoire consacré au relation de Saint Augustin le père de L’Eglise , ancien évêque d’Hippone l’actuel Annaba et de Plotin philosophe grec.
Peu de choses au yeux de ces intellectuels bardés de diplômes !
Par ailleurs il est vrai qu’Albert Camus est d’abord et avant tout un écrivain, une plume qui évite de jargonner comme certains de ses détracteurs.
Et , enfin, sa pensée que nous allons analyser se méfie avant tout des systèmes, des théories, des analyses abstraites faites dans un langage  souvent difficile d’accès.
Alors oui, Albert Camus n’est pas un philosophe de système et on ne lui doit aucune théorie voulant expliquer la totalité du monde mais est-ce a dire ,pour autant, qu’il n’est pas philosophe au sens de celui qui questionne le monde et donne son point de vue sur les grandes questions qui se posent a l’humanité ,je ne le pense pas et je suis même sur du contraire.
Et c’est à cette recherche de la philosophie de Camus que je veux en venir maintenant.

Comme ,précisément il n’élabore pas vraiment un système totalisant, expliquent le  monde il est préférable de commencer par souligner ce qu’il n’est pas, d’analyser les théories qu’il rejette clairement pour tenter ensuite de voir sa propre pensée.
I. L’incroyance

La première chose à souligner ,car elle sous-tend l’ensemble de sa pensée , c’est son incroyance, son refus de Dieu et des religions, car ce refus premier qui le conduit à sa thèse de l’absurde. Le monde , en effet ,ne peut être absurde pour ceux qui croient a une vie ultérieur ,à un monde autre que notre monde terrestre. Pour eux la vie a un sens.
Or Camus n’a jamais pu entrer dans cette foi. Il le dit a de très nombreuses reprises lorsqu’il évoque l’horreur de la mort.
Cela ne l’empêche pas de respecter les croyants et même pourrait on dire de les envier. Il faut lire à cet égard la conférence qu’il donna devant des religieux au couvent des dominicains de Latour-Maubourg en 1948 ( La Pléiade-Essais-p.371 et  s)
Ce texte est important car il nous montre clairement la façon de faire d’Albert Camus et d’abord son respect de l’interlocuteur.
Il faut citer ici , cette partie du texte :
« En second lieu, je veux  déclarer encore que, ne me sentant en possession d’aucune vérité absolue et d’aucun message, je ne partirai jamais du principe que la vérité chrétienne est illusoire, mais seulement de ce fait que je n’ai pu y entrer. » et plus loin :
« Ceci dit, il me sera plus facile de poser mon troisième et dernier principe. Il est simple et clair. Je n’essaierai pas de modifier rien de ce que je pense  ni rien de ce que vous pensez  ( pour autant que je puisse en juger) afin d’obtenir une conciliation qui nous serait agréable à tous. Au contraire ce que j’ai envie de vous dire aujourd’hui c’est que le monde  a besoin de vrai dialogue, que le contraire du dialogue est aussi bien le mensonge que le silence, et qu’il y a donc de dialogue possible qu’entre des gens qui restent ce qu’ils sont et qui parlent vrai. »
Ce texte montre un grand respect de l’interlocuteur a qui on va dire clairement et sans détour son point de vue mais on dont on va respecter la pensée.
Et cela ne l’empêche pas de dire des choses fortes et même dures. C’est ainsi qu’il va dire a ces religieux qu’il n’a pas compris le silence du Pape pendant la période nazis. Il fait référence ici à un problème souvent soulevé sur le silence du Pape Pie XII face aux crimes nazis. Cette affaire a donné lieu après le décès de Camus a une pièce de théâtre qui a fait scandale a son époque et qui s’intitule Le Vicaire  de  Rolf Hochhut en 1963 et, plus tard encore, au film de Costa-Gavras :  « Amen. »
Je trouve que c’est Camus qui a le mieux posé  cette question :
« Et pourquoi ici ne le dirais-je pas comme je l’ai écrit ailleurs ? J’ai longtemps attendu pendant ces années épouvantables qu’ne grande voix s’élevât de Rome.  Moi incroyant ? Justement. Car je savais que l’esprit se perdrait s’il ne poussait pas devant la force le cri de la condamnation. Il paraît que cette voix s’est élevée. Mais je vous jure que des millions d’hommes avec moi ne l’avons pas entendu et qu’il y avait alors dans tous les cœurs, croyants ou incroyants, une solitude qui n’a pas cessé de s’étendre à mesure que les jours passaient et que les bourreaux se multipliaient.
On m’a expliqué depuis que la condamnation avait été bel et bien portée. Mais qu’elle l’avait été dans le langage des encycliques qui n’est point clair. La condamnation avait été portée et elle n’avait pas été comprise ! Qui ne sentirait ici où est la vraie condamnation et qui ne verrait que cet exemple apporte en lui-même un des éléments de la réponse…..Ce que le monde attend des chrétiens est que les chrétiens parlent a haute et claire voix, et qu’ils portent leur condamnation de telle façon que jamais le doute, jamais un seul doute, ne puisse se lever dans  le cœur de l’homme le plus simple. »

Il ne croit donc pas mais respecte ceux qui croient et cela on le verra aussi dans ses romans et notamment l’étranger et La Peste.
Dans l’Etranger on se souvient qu’après sa condamnation à mort Meursault  va avoir un long entretien avec l’aumonier venu lui proposer son aide, aide qu’il refusera. C’est un dialogue puissant dans lequel et à plusieurs reprises Meursault confirme à l’aumonier qu’il ne croit pas et que cela ne l’intéresse pas et il va jusqu’à la colère face a l’insistance du prêtre.
Dans La Peste Camus met aussi en scène un dialogue entre un athée et un croyant ,un prêtre et c’est alors pour montrer que face a un fléau comme la peste il n’est pas nécessaire de croire pour agir et qu’au contraire là où l’homme d’Eglise agit en priant celui qui ne croit pas est plus pratique et il agit ici et maintenant, sur cette terre avec ses moyens pour lutter contre le fléau et aider ses frères humains.
Il y a donc dans cette attitude une mise en place d’une philosophie de la solidarité humaine sans avoir besoin de ce je n sais quelle croyance.


II. L’amour du monde et de la vie

Il est donc incroyant mais il aime le monde et la vie. Chacun connaît ,plus ou moins la vie de Camus qui , d’une certaine manière n’a pas été épargné par le malheur (perte du père juste après sa naissance- pauvreté- sa vie dans une famille illettrée- la maladie grave qui l’atteint jeune encore et qui le poursuivra toute sa vie- difficultés dans sa vie familiale et, enfin , drame de l’Algérie son pays natal) et malgré cela Camus est doué pour le bonheur  et il aime le monde qu’il glorifie comme on glorifie un Dieu.
Il suffit de lire son « Noces a Tipaza » pour comprendre une autre partie de sa philosophie l’accord de l’homme avec le monde, la jouissance des plaisirs simples que donne le soleil et la mer et d’ailleurs il nous dit clairement : a quoi bon les Dieux quand on peut jouir des plaisirs de la vie, de la nature du ciel et de la mer. Ne pourrait-on pas dire qu’il est panthéistes et que pour lui les dieux sont partout et surtout dans la nature ?
Ainsi ce très beau  texte :
« Bien pauvres sont ceux qui ont besoin de mythes. Ici les dieux servent de lits ou de repères dans la course des journées. Je décris et je dis : « Voici qui est rouge, qui est bleu, qui est vert. Ceci est la mer, la montagne, les fleurs » Et qu’ai-je besoin de parler de Dionysos pour dire que j’aime écraser les boules de lentisques sous mon nez ? Est-il même a Demeter ce vieil hymne  à quoi plus tard je songerai sans contrainte : « Heureux celui des vivants sur la terre qui a vu ces choses. » Voir rte voir sur cette terre, comment oublier la leçon ? »

Il y a là un deuxième aspect très important de la philosophie de Camus. Le monde est beau, vivre est souvent agréable et il faut savoir profiter de ce don.

III. L’absurde

Et finalement ce que l’on a retenu de la philosophie de Camus la notion de l’absurde qu’il a développé dans le mythe de Sisyphe c’est précisément le rapprochement qu’il fait entre cet amour de la vie, de la beauté , de la jouissance et la mort.
Vivre est merveilleux mais l’on va mourir. Cela le heurte, le choque, lui fait mal. Il déteste cette idée de ne plus jouir de la vie et cette interrogation qui est d’ailleurs la question fondamentale qui interroge le monde depuis l’origine est celle qui a conduit les peuples de la terre a recherché Dieu, pour Camus à l’inventer car il est choqué par cet appel a un sens face  « au silence déraisonnable du monde ». Oui, il s’interroge sur la finitude de l’homme et personne ne lui répond

IV La solidarité et l’action

En présence de l’absurde et de l’appel à la jouissance des beautés du monde il aurait pu s’orienter vers une sorte de philosophie de l’égoïsme. Puisque il n’ y a rien après la mort et que le monde est beau alors contentons-nous d’en jouir et, pour ce faire, ne nous occupons que de nous, dégageons nous de toutes obligations et servitudes. Par ailleurs puisqu’il n’ y a rien après la mort et surtout pas de jugement alors tout est permis d’une certaine façon.
Et bien pour Albert Camus c’est le contraire. Il insiste sur la nécessité de se créer une morale à l’échelle de l’homme. L’homme doit faire son travail, il doit essayer d’améliorer ce qui peut l’être, il doit être solidaire des autres hommes. La solidarité c’est, je pense, un des grands principes d’action de cet écrivain. Et dans le fond ,nous dit-il, c’est dans l’action, dans l’amélioration de la vie que l’homme peut trouver sa joie. Certes c’est à la fois modeste et toujours à recommencer mais il n’ y a pas d’autres solutions et alors on peut imaginer « Sisyphe heureux » »
Cet exigence de la solidarité elle est enfouie profondément dans le caractère même d’Albert Camus qui a toujours aimé l’amitié sincère, la camaraderie. On se souvient que ces moments de bonheur sont ceux qu’il a passé avec des équipes que ce soit les comédiens quand il s’adonne au théâtre ou des ouvriers typographes quand il est journaliste et qu’il aime descendre au marbre. Et, enfin, ne nous a-t-il pas dit que tout ce qu’il avait appris de sérieux c’est en jouant au foot ?
Camus n’est pas un penseur solitaire et c’est pourquoi il a souffert lorsque le milieu parisien après l’avoir accueilli lui a battu froid.
Et dans son discours de réception du Prix Nobel il est encore revenu sur cette solidarité nécessaire et notamment avec les personnes persécutées injustement.
« Je ne puis vivre personnellement sans mon art. Mais je n’ai jamais placé cet art au-dessus de tout. S’il l’est nécessaire au contraire, c’est qu’il ne se sépare de personne et me permet de vivre, tel que je suis, au niveau de tous. L’art n’est pas à mes yeux une réjouissance solitaire. Il est un moyen d’émouvoir le plus grand nombre d’hommes en leur offrant une image privilégiée des souffrances et des joies communes. Il oblige donc l’artiste à ne pas s’isoler ; il le soumet à la vérité la plus humble et la plus universelle. Et celui qui, souvent, a choisi un destin d’artiste parce qu’il se sentait diffèrent, apprend bien vite qu’il ne  nourrira de son art, et sa différence, qu’en avouant sa ressemblance avec tous. L’artiste se forge dans cet aller-retour perpétuel de lui aux autre, à mi-chemin de la beauté dont il ne peut se passer et de la communauté à laquelle il ne peut s’arracher. C’est pourquoi les vrais artistes ne méprisent rien ;ils s’obligent à comprendre au lieu de juger.   Et s’ils ont un parti à prendre en ce monde, ce ne peut être que celui d’une société où, selon le grand mot de Nietzsche, ne règnera plus le juge mais le créateur qu’il soit travailleur ou intellectuel. »

V. Le rejet des idéologies
On voit déjà se dessiner la pensée de Camus mais il faut absolument compléter ces idées par l’une de celle qui, a mon sens, domine sa philosophie : le rejet des idéologies, des systèmes complet qui veulent décrire la totalité du monde.  Il ne serait pas loin de penser avec Shakespeare qu’ ‘il y  a plus de choses dans le monde et sur la terre que dans toute la philosophie »
Une grande partie de ses écrits sont une condamnation du totalitarisme et de la violence qui lui est nécessaire. Bien sûr le totalitarisme nazi cela va sans dire qu’il condamne tout en respectant le peuple, allemand dans ses Lettres a un ami allemand, mais aussi et c’est , à l’époque assez peu répandu, le totalitarisme communiste.
Dans l’Homme révolté il analyse les mécanismes  du totalitarisme et les condamne fermement. Cela lui a valu, on le sait , le mépris et le rejet d’une grande partie de l’intelligentsia et des sartriens en premier lieu. Mais c’est  à lui que l’avenir a donné raison et il a été d’ailleurs la raison d’espérer de beaucoup dans les pays touché par le communisme. Dans le fond il a approfondi les idées qu’avait déjà exprimé André Gide dans son « Retour d’URSS ».
Mais ne soyons pas dupe. Il n’est pas pour autant fervent défenseur du libéralisme et quand la droite veut se l’approprier comme c’est le cas de nos jours elle se trompe car si Camus refuse le communisme parce qu’il porte atteinte aux libertés et qu’il est amené à user de violence, il ne soutient pas, pour autant le libéralisme et c’est ce qui a fait que les libertaires, les anarchistes ont retrouvé chez Camus des idées à eux.

Comme on le voit il n’ y a pas chez Albert Camus de grandes théories car il est bien conscient de la complexité du monde qui ne peut se laisser renfermer dans une idéologie, mais il y a des principes qui permettent aux hommes de faire face au monde : absurdité de notre destin, solidarité nécessaire entre les hommes, nécessité de préserver la liberté et rejet de la violence. C’est peu diront certains . Je crois que c’est au contraire beaucoup et la popularité qu’il connaît de nos jours est la preuve que les lecteurs ont compris son message et y adhérent.
Face a toutes les tentations totalitaires qui veulent faire le bonheur des hommes en créant nous disent ces idéologies « un nouvel homme » il insiste pour que l’homme soit respecté et que sa liberté de jouir du monde lui reste acquise.


mardi 3 juillet 2018

La confusion des sentiments de Stefan Zweig au Théâtre de la Grange d'Angaïs

J'ai assisté, hier soir, à un spectacle du théâtre de la Grange a Angaïs comme je le fais tous les ans depuis une quinzaine d'année. C'est toujours un plaisir tant ce lieu est charmant avec sa grange transformé en petit théâtre et la possibilité qui est donné de dîner ensuite permettant aux spectateurs de discuter du spectacle qu'ils viennent de voir.
Hier soir le public, nombreux, était absolument ravi et chacun soulignait la performance réalisée par Boy Demazières, l'organisateur de ce festival qui a tenu une heure trente seul en scène a nous dire ce texte sans que jamais le public ne ressente la moindre monotonie.
J'avais lu le livre de Stefan Zweig il y a de nombreuses années et je l'avais oublié. Je l'ai redécouvert avec beaucoup de plaisir et même mieux que lors de ma première lecture.
Le recit débute le jour où un vieux professeur reçoit de ses collègues et de ses élèves des "Melanges" recueil qui est offert à un professeur d'université qui quitte ses fonctions et qui comprend des contributions de ses collègues et un recensement des ses propres écrits. Ce jour là, ce vieux professeur, se dit que tout n'est pas dans ces mélanges et qu'il y manque un événement essentiel, fondateur, qui a eu lieu dans a jeunesse.
Tout le livre est le récit de cet événement. Jeune étudiant à Berlin il était un garçon dissipé, il rejetait par une sorte d'opposition adolescente à son père la littérature et le travail de l'esprit. Son père, voyant qu'il se perdait à Berlin lui conseilla d'aller étudier dans une petite Université et c'est là qu'il fit la connaissance de celui qu'il appellera, tout au long du recit, "son maître", un professeur qui, dés le premier contact, va l'éblouir par sa passion de transmettre , par ses connaissances et par ce feu sacré qu'il met a faire ses cours. Il y a, au passage, un bel éloge de l'enseignant qui se doit d'être plus qu'un simple pédagogue, formule dont on mesure encore aujourd'hui la grande actualité.
Devenu l'intime de ce professeur et de sa femme on sent , tout au long du déroulement du récit que les rapports a entre ce professeur et lui sont particulier., fait d'élans et de rebuffades, d'admiration et de questionnement et ce sont ces relations que Stefan Zweig analyse avec beaucoup de finesse ( Freud admirait beaucoup cette oeuvre) et l'on apprendra, à la fin, que le professeur a aimé son élève et que l'élève, devenu ce vieux professeur, a aussi, d'une certaine manière aimé ce maître sans que jamais les sentiments ne soient exprimés et qu'ils demeurent dans la confusion.
Cette chute est amené par Zweig par petites touches tout au long et à la fin , on se dit, mais bien sûr, c'est évident!
Ce spectacle m'a t-on dit va se poursuivre dans le pays basque et finir en octobre a Biarritz et je ne peux que conseiller d'y aller.
Je viens aussi de constater qu'il y a eu film tiré de ce roman et qui a l'air réussi.

jeudi 14 juin 2018

Jules Gervais Courtellemont.


L'intérêt d'une bibliothèque importante est que l'on peut redécouvrir , par hasard, des livres que l'on avait perdu de vue.C'est ce qui vient de m'arriver. J'ai redécouvert un livre de photographie qui l'avait été offert,il y a longtemps, par une amie et consacré au photographe  Jules Gervais Courtellemont et à ses photos d'Algérie.
On verra  en lisant l'entrée qui lui est consacrée dans Wikipedia qu'il a eu une vie très riche, qu'il a beaucoup voyagé et qu'il était fasciné par l'Orient.
On pourra lire aussi cet article sur photographie au Maghreb paru récemment.

dimanche 27 mai 2018

Huit jours a Calais

Un ami m'a offert un petit livre édité par les éditions maiade, écrit par Françoise Dudognon :"Quelque chose dans la la lande. Huit jours à Calais.". C'est d'abord un beau petit livre avec une très belle image de couverture qui représente une plage de sable ,l'océan et au fond le ciel et par dessus tout cela un instrument de musique venu d'ailleurs, une sorte de guitare africaine.
Ce livre est le récit d'un séjour de quatre femmes à Calais, venues pour aider les migrants et il raconte, comme un journal l'activité de ces quatre femmes de bonne volonté qui veulent aider à améliorer un peu le sort de tous ces gens malheureux.
J'ai beaucoup apprécié le style à la fois simple, net et par moment émouvant. On peut à lire ce texte s'imaginer ce monde que l'on ne connaît que par des articles de presse et en comprendre l'humanité. Rien n'est appuyé et le pathos en est absent.
Après cette lecture on a rien appris sur ce qu'il faut faire. Doit-on et peut on accueillir dignement tous ces gens? La réponse n'est sans doute pas la même quand on résonne sur la question politique et quand on est confronté l’humain, à l'individu. J'admire en tous cas tous ces gens qui aident tout en ayant, sans doute conscience, qu'il s'agit d'un puit sans fond et que l’aide apportée, si elle soulage ne règle rien. Elle est , cependant, la preuve de l'humanité .

mardi 22 mai 2018

André Brink : Une saison blanche et sèche

Comme souvent c'est après avoir vu le très beau film tiré du roman d'André Brink : Une saison blanche et sèche avec Suzanne Sarandon et une intervention remarquable de Marlon Brando en avocat que j'ai eu envie de lire le roman.Le livre de poche que je viens de recevoir contient une préface rédigée par Ann Wakefield et Gilbert Pestureau qui revient sur l'analyse de ce roman, sur sa place dans la lutte d'un certain nombre d'écrivains contre le régime d'apartheid (Nadine Gordimer, JM Goetze) et les auteurs nous disent qu'André Brink avait une grande admiration pour la vie et l'oeuvre d'Albert Camus et notamment sa vision de l'homme révolté.
Ce roman nous montre d'abord un homme, Ben, vivant une vie de famille tranquille en Afrique du Sud entre son métier de professeur, l'amour de ses enfants, l'amour du travail manuel et sans grande ambition (ce que lui reproche sa femme Susan) et sans ,non plus se préoccuper de la politique de son pays que , dans le fond, il ne voit pas.
Puis des drames vont survenir qui ne le touchent pas directement mais qui frappe un employé noir, un jardinier employé par l'école où il travaille et qui vient de temps en temps faire du jardinage chez lui.
Et donc ce noir, il a appris à le connaître , a connaître son histoire et sa famille et il a de l'estime pour lui. Quand le fils de ce jardinier est d'abord injustement puni et humilié par la justice. Il déconseille au père de faire quoique ce soit. C'est une erreur et elle aura de très grave conséquence car le jeune Jonathan n'a pas supporté cette humiliation et cette injustice et il va se joindre aux jeunes qui, à cette époque (les années 1970) se rebellent contre le pouvoir blanc. Jonathan va donc participer a des manifestations pacifiques mais que la police répriment avec une très grande violence et il finira par être tué, torturé et tué par cette police raciste et aux méthodes criminelles.
Cette police fera tout pour ne pas dire la vérité au père qui l'apprendra à la suite d'une longue recherche pour retrouver le corps de son fils. Ben qui aidait ce jeune a faire des études sera ,évidement bouleversé ,par ce drame et commencera a comprendre la nature du régime politique d'apartheid et de violence.
Et cette violence ne sera pas finie. Le jardinier sera aussi torturé et tué simplement parce qu’il eu la volonté de connaître la vérité et d'obtenir justice! Puis ce pouvoir haineux s'en prendra à la mère qui mourra aussi.
Ben va alors faire sa propre enquête, rechercher les témoins, reconstituer les faits pour qu'ils soient jugés. Il réussira a recueillir toutes les preuves de ces comportements criminels, à les transmettre à quelqu’un de sûr, un écrivain qui pourra en parler. En prenant ainsi le parti de la justice il sera mal vu d'une partie de sa famille, de ses collègues et amis mais rien ne l’arrêtera jusqu'au jour où,lui aussi, sera tué par cette police déshonorée.
En lisant ce roman qui est très prés de ce qui s'est réellement passé on se demande ,une nouvelle fois, comment des comportements aussi "inhumains" sont possibles comme on se le demande, hélas, trop souvent dans les guerres, les génocides, la torture. Comment des hommes en arrivent a ce niveau d'inhumanité? Il n ' ya , hélas, pas de réponses raisonnables.
Il faut lire ce livre magnifique et l'on trouvera ,ici, une analyse littéraire et historique.
                                       

                             


jeudi 3 mai 2018

Vitaly Malkin: Illusions dangereuses

Je viens de recevoir le livre de Vitaly Malkin qui a pour titre : Illusions dangereuses mais surtout comme sous titre :"Quand les religions nous privent de bonheur". Ce livre est d'abord un beau livre dans sa présentation et dans les nombreuses illustrations qu'il contient a savoir des reproductions d’œuvres de peintres célèbres. Il est édité par les Editions Hermann .
Le livre est vendu avec un bandeau reproduisant une phrase de l'écrivain Frédéric Beigbeder: "Ce pamphlet ambitieux prolonge la pensée de Voltaire et du marquis de Sade, deux antireligieux célèbres."
Entre le sous-titre et ce bandeau on voit déjà , à peu prés, le but que poursuit l'auteur et ce but est clairement analysé ,par ailleurs dans la Préface de ce livre traduit du russe.
Il écrit dans cette préface: "Ma thèse est simple: les monothéismes conduisent infailliblement à la haine de soi et des autres, que ceux-ci partagent ou non la même foi. Si Dieu aimait vraiment les hommes,il devrait non pas leur interdire le plaisir, mais les aider à en obtenir davantage. Mais Dieu ne les aime pas. Comme le dit Boualem Sansal , "la religion fait peut-être aimer Dieu, mais rien n'est plus fort qu'elle pour faire détester l'homme et haïr l'humanité."
Ce livre a , par ailleurs un mérite. Il n'est pas écrit comme le serait une thèse universitaire et même s'il est très documenté, érudit par moment , son style en est personnel, l'auteur mêlant a sa recherche des analyses et des expériences personnelles comme le point de départ dont il nous dit qu'il a eu lieu, au cours d'un voyage au Maroc , une expérience de mirages dans le désert.
L'auteur nous dit dans sa préface que l'on peut lire son livre sans nécessairement suivre le cheminent du livre mais en passant d'un chapitre à un autre. En ce qui me concerne je me suis efforcé de lire tout à la suite en commençant par le chapitre initial qui est fondamentale puisque l'auteur analyse les rapports de la raison et de la foi qu'il en décrit les évolutions et, en particulier le recul de la raison avec l'apparition des religions monothéistes.qui mettent la "raison en cage".
L'auteur montre aussi et c'est une idée que je partage entièrement que si Dieu était comme on le dit "bon, tout puissant et omniscient" comment alors expliquer l’existence du mal qui est partout dans le monde? et il développe beaucoup, de manière intéressante, la question de l'existence de Dieu face à la Shoah et il mène , ensuite, une longue étude de l'attitude à l’égard de la mort en partant de peuplades primitives et il en est amené a considérer que "Les religions monothéistes dans leur ensemble sont bien plus des religions de la mort que de la vie. Leur but est de transmuer la peur naturelle de la mort en un espoir et un désir d'immortalité dans une vie outre-tombe." (p.146)
Puis l'auteur nous montre l'attrait des religions pour la souffrance et logiquement la condamnation du plaisir et tout particulièrement du plaisir sexuel qui est la bâte noire de toutes les religions monothéistes. Ces chapitres captivants sont , par ailleurs , très bien illustrés avec des oeuvres très belles et très bien reproduites.
Si l'on ajoute que le livre se termine par une bibliographie qui permet au lecteur d'aller aux sources on dira qu'il s'agit à la fois d'un beau livre sur une question essentielle pour l'humanité  et j'en recommande la lecture. le lecteur y apprendra beaucoup et aura l'occasion au fur et à mesure des chapitres de contempler de belles oeuvres d'art.
Voilà le site du livre qui vous permettra de lire des extraits et de voir des vidéos


lundi 2 avril 2018

Romain Gary: La promesse de l'aube

De Romain Gary je n'avais lu que ce qu'il a publié sous le nom d'Emile Ajar et son merveilleux : "La vie devant soi" dont on a tiré un film magnifique dans lequel Simone Signoret est une madame Rosa inoubliable.
Je viens de revenir à Romain Gary fort curieusement grâce à Nicolas Sarkozy qui a dit tout ce qu'il aimait en littérature dans une émission de la chaîne parlementaire :"Livres et vous" et qui a fort bien parler de Romain Gary. J'ai lu aussitôt :La promesse de l'aube et je dois dire que j'ai beaucoup aimé cette sorte autobiographie, ce récit de sa jeunesse et de ses relations avec sa mère. Ce qui domine , me semble t-il sa façon d'écrire c'est la grande place faite à l'humour. Les événements et les caractères sont peints de manière souvent drôle.
Ce livre nous montre comment une mère peut aider  son fils, lui donner une assurance dans la vie, le protéger et il est vrai qu'elle est une sorte de modèle de la "mère juive". Il ya beaucoup de scènes touchantes , des moments de  difficultés que la mère affronte avec une réelle énergie et du courage et avec toujours cette conviction qu'elle a et qu'elle transmet que son fils fera de grande chose au service le France, qu'il sera "ambassadeur de France, "Grand écrivain"et , de fait , il le sera.  Cette mère étrangère donne a son fils une très belle image de la France et elle ressemble en cela a beaucoup de familles immigrées de toutes nationalité qui s'installant en France, souvent miséreuses, donnent a leur enfants l'amour de leur nouveau pays. Est-ce toujours le cas aujourd'hui? On peut en douter.
Il ya beaucoup de moments émouvants comme ce jour où Romain Gary ayant obtenu le Prix Goncourt,il se rend aux Editions Gallimard et là prend connaissance d'une lettre qui lui a été adressé et dans laquelle est racontée la mort de son père dans un camp de la mort, ce père qu'il n'a pas connu et voici ce qu'il écrit: "Dans sa lettre, sans doute pour me faire plaisir,il m'écrivait que mon père n'était pas arrivé jusqu'à la chambre à gaz et qu'il était tombé raide mort de peur, avant d'entrer.

Je suis resté longuement la lettre à la main; je suis ensuite sorti dans l'escalier de la NRF; je me suis appuyé à la rampe et je suis resté là,je ne sais combien de temps, avec mes vêtements coupés à Londres, mon titre de Chargé d'Affaires de France, ma croix de la Libération, ma rosette de la Légion d'honneur et mon prix Goncourt.

J'ai eu de la chance: Albert Camus est passé à ce moment-là et, voyant bien que j'étais indisposé,il m'a emmené dans son bureau.
L'homme qui est mort ainsi était pour moi un étranger; mais , ce jour-là, il devint mon père a tout jamais." p.122 collection Folio
Il y a, aussi, ce que fait cette mère pendant que son fils fait la guerre. Alors qu'elle est sur le point de mourir et pour que sa disparition ne trouble pas son fils elle met au point un stratagème. Elle écrit plusieurs lettres qu'elle fera poster par une amie a prés sa mort et a intervalles réguliers. Ainsi Romain Gary n'apprendra la mort de sa mère que trois ans et demi après sa disparition.
Il me faudra voir le film pour savoir si il est à la hauteur de ce magnifique livre.
                                   
Et enfin une très belle critique à l'occasion de le rentrée de ses oeuvres dans la Pléiade et encore cette analyse d'Eric Fottorino


dimanche 18 mars 2018

Mon nouveau livre: "Le vieux monsieur à Venise"

Les éditions L'Harmattan avaient accepte de publier mon nouveau livre : "Le vieux monsieur à Venise" et a,alors débutée la période de fabrication du livre. Je leur ai  adressé une photographie qui pouvait bien illustrer, selon moi , la couverture. Hors je me suis aperçu que cette maison d'édition avait des pratiques singulières. D'abord le contrat prévoyait qu'elle ne rémunérait qu’après la vente des 500 premiers ouvrages. J'ai accepté cette clause exjorbitante car cette publication n'est pas ,pour moi, une question d'argent. Mais après je me suis vite rendu compte que cet éditeur ne faisait pas son travail d'éditeur et qu'ayant relevé un certain nombre de fautes d’orthographes ou de grammaire il sollicite de l'argent pour les corrections alors que c'est le travail de tout éditeur sérieux et alors surtout qu'il ne paie rien avant les 500 exemplaires. J'ai donc renoncé a ce contrat et j'ai décidé de publier moi-même sur internet.
Le livre porte un sous-titre,un peu énigmatique mais qui dit quel est le projet."Autobiographie sentimentale et romanesque" . Je reproduit ici le texte de la dernière de couverture que j'ai rédigé et qui vous en dira un peu plus (mais pas trop et pas tout) sur ce qu'est ce livre.


"Ce récit, autobiographie sentimentale et romanesque, aurait pu s’intituler, si le titre n’était pas déjà pris : « Une vie », une vie à la fois ordinaire et extraordinaire comme le sont toutes les vies. Il y a là une confession avec ce qu’elles ont quelques fois d’impudique et il en résulte un autoportrait intellectuel et moral d’un homme du siècle, probablement un exemple d’une espèce en voie de disparition, attaché aux livres, à la réflexion et à Venise et, ici, animé par un grand amour et par le souvenir impérieux, à la fois doux et nostalgique, de l’Algérie pays de l’enfance, revu une dernière fois, après une très longue absence, avant la mort.
Ce voyage de retour, sur les lieux de sa jeunesse à Sétif, Constantine et Alger, plus de cinquante ans après avoir quitté le pays et qui, selon l’auteur, « boucle sa vie »  accentue encore chez lui le sentiment du temps qui passe, détruisant tout et  lui donne une plus grande lucidité sur la vie.
Celui qui s’exprime, ici, essaye de donner une cohérence à sa vie, dresse son portrait en écrivant ce qu’il aime et se rend compte qu’il n’y a d’homme et de vie d’homme que par la mémoire. Que serions-nous sans l’armature de notre mémoire ? Rien. C’est elle qui rassemble cet être ondoyant et divers que l’on appelle moi."

Certains y retrouveront (pour un tiers environ) le récit de mon voyage de retour en Algérie en 2015 mais tout le reste est nouveau.
Ce livre est disponible en version papier et en version tablette et smartphone sur Amazon.
Et voici une

vendredi 16 février 2018

Ronald Aronson : Sartre et Camus. Amitié et combat

Ronald Aronson, spécialiste de Sartre outre-atlantique  a consacré en 2004 un important ouvrage aux rapports entre Sartre et Camus. Le livre est paru en France aux Editions Alvik en 2005 et cette somme nous donne à la fois le détail de l'amitié qu'il y eut entre les deux hommes et analyse en détail ce qui les opposait et qui a prie une énorme proportion dans le conteste de guerre froide qui régnait alors sur le monde et qui sommait chacun de prendre parti. Comme il le dit dans son prologue ce climat politique les a obligé, d'une certaine façon, a aller au del94)à même de leur réelles divergences. Sartre n'était pas tout  a fait communiste et Camus n'était pas davantage un supporter du capitalisme mais les nuances de leurs pensées véritables étaient écartées au profit d'un affrontement frontal entre les deux idéologies. Telle est , semble t-il, la thèse de l'auteur.
Il y a d'abord une réelle amitié entre les deux et ce malgré les différences d'origine et de formations gens s'amusent beaucoup dans le Paris de l'époque.  Mais avant même les différences d'idée il y a une différence évidente entre leurs deux façons d'écrire.
L'auteur écrit ceci qui est très juste:  "Bien que les deux écrivains nous aient laissé des ouvrages philosophiques ou romanesques importants et qu'ils aient abordé avec succès des genres littéraires très variés, Sartre est, par tempérament, avant tout un philosophe voué à la théorie et aux idées générales, tandis que Camus est avant tout un romancier, plus à son aise dans la traduction de situations concrètes." ( p.30)
Une différence va aussi apparaître au moment de la guerre. Camus s'engage dans la Résistance alors que Sartre reste un peu en arrière. Il le reconnaîtra d'ailleurs dans un  bel éloge du Camus de cette époque.
"Vous avez vécu un combat austère, sans gloire ou fanfare. Ses dangers n'étaient guère exaltants et pire vous avez pris le risque d'être dégradé et avili. Sartre a reconnu que Camus avait vécu cette histoire plus profondément et entièrement que bon nombre d'entre nous"
Sarre nous dit que Camus est devenu "la conjonction admirable d'une personne, d'une action, et d'une oeuvre."
On voit donc à la fois la réelle amitié ( un vrai coup de foudre selon Simone de Beauvoir) et l'admiration de Sartre pour Camus qu'il place dans la ligné des écrivains engagés (Voltaire-Zola)et dont il fait ,à cette époque le type même de l'écrivain engagé (p.94 ) et cela ne plait guère à Camus qui écrit cette phrase significative:" J'aime mieux les homes engagés que les littératures engagées. Du courage dans la vie et du talent dans ses oeuvres, ce n'est déjà pas si mal. Et puis l'écrivain est engagé quand il le veut. Son mérite c'est son mouvement. Et si ça doit devenir une loi, un métier ou une terreur, où est le mérite justement?" (p.95)
Ce livre contient aussi, évidement, un très long développement à la rupture entre les deux écrivains à la suite de la publication de L'homme révolté et l'on ne peut que prendre plaisir à lire les échanges très vifs mais magnifiquement écrits entre Jeanson, Camus et Sartre.
Le livre se termine sur l'opposition de Sartre et de Camus sur l'Algérie et là, on est bien obligé d'admettre que Sartre a eu raison contre Camus. L'auteur montre bien que si Camus était tout a fait en avance et très lucide dans les années 1938-1940 il ne réussira pas a prendre la réelle mesure de l'action du FLN et continuera de penser que des aménagements certes sérieux auraient pu suffire alors qu'il n'en est rien. .
Au total un livre très dense , très bien documenté et équilibré dans son jugement sur ces deux grands intellectuels.

mercredi 14 février 2018

Alessandro Bresolin: Albert Camus: l'union des différences

Je commence la lecture d'un livre d'Alessandro Bresolin publié aux Editions Fédéralistes et intitulé : "Albert Camus:l'union des différences". J'ai commencé par la préface d’Agnès Spiquel, grande spécialiste de Camus dont je voudrai vous donner un extrait. On sait que Camus aurait souhaité pour l'Algérie une troisième voie et , notamment il a soutenu un projet fédéraliste. Voici ce qu'écrit Agnès Spiquel:
"On sourira et on criera à l'utopie comme, dans les années 1950 ,on a crié à l'aveuglement devant les tentatives courageuses des Libéraux qui, avec Camus, ont tenté de promouvoir une Algérie libérée de la colonisation mais plurielle et conservant un lien avec la France dans le respect et "l'union des différences". La troisième voie, qu'ils ont tenté de frayer entre les solutions de plus en plus extrêmes auxquelles recouraient les nationalistes et les colonialistes, n'était pas celle d'un juste milieu confortable pour la conscience-mais bien un choix résolu pour la liberté et pour la justice.LEUR ÉCHEC HISTORIQUE N’INVALIDE PAS LEURS CONVICTIONS POLITIQUES."
Pour le reste l'ouvrage contient une première partie consacrée à la question algérienne et à la position de Camus dans cette période cruciale qui va des années 30 à la fin de la guerre en 1945. Cette partie est une analyse très complète de la position ,notamment des algériens dont la plupart des partis ne souhaitaient pas , à l'époque, se séparer de la France mais voulaient une égalité de traitement.On suit l'activité importante de Camus à cette époque d'abord dans le cadre de son adhésion au parti communiste puis lorsqu'il en fut exclu. C'est l'époque où il se met au théâtre qu'il pense être un excellent moyen d'éducation populaire. 
Un passage de cet ouvrage est également très intéressant lorsqu'il montre que les partis musulmans en Algérie ne se sont pas laissé prendre par les sirènes du régime de Vichy qui pensait les attirer à lui et a sa politique par son antisémitisme et par l'abolition du décret Cremieux. (p.84 et s) Ces partis furent loyaux à la France et à ses valeurs et cela explique leur profonde déception après la guerre. 
L'auteur s'attache ensuite a montrer l'attachement que Camus avait pour l'Espagne dont il aimait les paysages, le caractère des espagnols qui ressemblait a ce qu'il était et son attitude politique à l'égard de la guerre civile. Il lutta toute sa vie contre le franquisme et eut honte de l'attitude de la France et de l'Europe face à Franco.
J'ai beaucoup apprécié ,aussi, la partie consacrée aux relations de Camus avec l'Italie et, notamment cette analyse de la réception du fascisme si différente dans un pays comme l'Allemagne et en Italie , ce qui confirme à Camus l'idée que dans les pays méditerranéens "la doctrine recule devant le pays" (p.114)
Et enfin l'auteur et c'est l'objet de son étude étudie les conceptions fédéralistes de Camus qui ont échoué, notamment en Algérie, entraînant le pays vers un nationalisme étroit et borné.
Au détour de cette étude on rencontre le poète Jean Senac (si injuste à l'égard de Camus ) et Assia Djebar qui, évoquant son appel pour une trêve civile écrit ceci;" Il est possible que ne se représente personne, dans le sillage de l'émouvant Camus de janvier 1956, qu'on ne trouve personne aujourd'hui, capable de prononcer, au milieu de l’arène, des mots semblables, d'une puissance qu'on espère supporter pour une dernière fois."
Et le livre contient aussi, à la fin, un entretien avec Catherine Camus devenu la gestionnaire de l'oeuvre de son père et qui parle notamment du projet de faire entrer Camus au Panthéon.
Au total un livre plein d'enseignements, riche d'analyse de l'oeuvre et des conceptions politiques de Camus. 

vendredi 2 février 2018

Ma chaîne Youtube

Je signale que je viens de créer une chaîne Youtube sur la quelle je poste des vidéos et qui sont donc accessibles en tapant dans le moteur de recherche de Youtube  jpryf.
Je consacre cette série de vidéos sur Youtube a mes coups de coeur littéraires, é des critiques de livres, à des lectures de textes d'auteurs etc....
Après la présentation de ma chaîne un jeune lycéen a laissé un message et parce que j'avais évoqué Albert Camus m' a écrit : "Tant mieux parce que nous allons l'avoir au programme!" A la suite de ce message j'ai décidé de poster des vidéos sur la biographie et l'oeuvre de Camus et j'ai commencé, ce matin par son enfance et sa formation. Je continuerai pour exposer  toute sa vie et pour , ensuite parler des oeuvres.
Ainsi avec ma page Facebook  Les amis d'Albert Camus et ces vidéos sur Youtube je vais faire oeuvre pédagogique et inciter les jeunes et les moins jeunes à lire cet auteur déjà très connu.

mardi 30 janvier 2018

Magda de Mazarine Pingeot

Mazarine Pingeot vient de publier chez Julliard un nouveau roman :"Magda"inspiré, semble t-il, de cette affaire qui a défrayé la chronique d'un groupe de jeunes soupçonnés de terrorisme et, notamment d'avoir tenté de saboter des voies de chemin de fer.( L'affaire de Tarnac) L'auteur met en scène à la fois celle qui est poursuivi avec son compagnon , Alice et les parents de celle-ci,Magda et Guillaume.
C'est l'occasion pour l'auteur de nous plonger dans le monde à part de  ceux qui refusent notre temps et nos façons de vivre, qui se replient dans des groupes assez fermés qui veulent expérimenter une nouvelle forme de vie, de consommation , de rapport aux autres et au pouvoir sous quelque forme qu'il soit. Cela pourrait être au Larzac et dans la Zad de Nantes mais là dans la campagne de Lozère.
Le roman débute lorsque Alice,son compagnon et ceux de son petit groupe sont arrêtés pour actes de terrorisme. La mère Magda l'apprend en regardant la télévision et sa vie s'en trouve tout à coup bouleversée.
Magda et Guillaume , eux-même, ont choisi une vie à l'écart dans un petit village des Pyrénées.Ce sont des réfractaires à notre vie moderne et ils sont nourris de lecture philosophiques et politiques, mais ils sont dans la réflexion et non dans l'action. On s'attache à leur vie dans ce petit village avec un fils handicapé et leur petite fille Rosa qu'ils recueillent  quand  Alice est mise en prison.
Ce qui arrive à Alice , l'instruction de l'affaire , les visites en prison vont les contraindre a réfléchir sur l'éducation qu'ils ont donné à leur fille. Quel est leur part de responsabilité? Doivent-ils remettre en question leur mode de vie et de pensée? Ne se sont-ils pas laissés "envoûtés" par des discours idéologiques? Il y a sur ce point une scène intéressante et significative entre Magda et un représentant de ces "idéologies" dont elle comprend le vide (p.192) et qui dénote comme elle le dit que "l'humour circule difficilement" dans ce genre de groupe! (p 53) C'est Magda qui donne son titre au roman et c'est justifié car elle est le personnage central, celui dont essaye de comprendre la psychologie te les comportements , bien plus qu'Alice, Guillaume ou Rosa.
Et il y a, ensuite, dans ce roman uns sorte de coup de théâtre que l'on pressentait tout au long du livre mais qui est bien amené et qui donne lieu à un chapitre passionnant dont je ne dirai , évidement rien, car c'est un des charmes de ce roman que de nous y amener, et , aussi , vers une fin émouvante et dure. Voilà une vidéo dans laquelle Mazarine Pingeot parle de son roman.

lundi 29 janvier 2018

François Sureau: Le chemin des morts

Voilà un tout petit livre ( 64 pages) paru chez Gallimard: "Le chemin des morts" et que je viens de lire, debout, dans ma librairie habituelle. Je ne l'ai pas acheté car je savais que je ne le lirai sans doute plus. Je voulais rester sur la réflexion et surtout sur l'émotion que sa lecture rapide m'avait donné. C'est un livre qui devrait être lu par tous les juges et tous les avocats qui tiennent, un jour, le destin d'un homme entre leurs mains.
L'auteur raconte  un épisode de sa vie de juge. Il est tout jeune et vient d'être nommé auditeur au Conseil d'Etat et il est très fier de ce métier qui le rapproche des plus grands juristes. Dans la Commission des recours dont il fait partie est examiné le sort d'un militant basque dont l'Espagne demande le retour et qui s'y oppose soutenant que sa vie serait en danger.
L'auteur nous raconte le délibéré de cette affaire les raisons des uns et des autres. Le Conseil d'Etat peut-il méconnaître que l'Espagne,libéré de Franco est une démocratie et un état de droit? Certains montrent bien, pourtant, que les anciennes milices, polices plus ou moins secrètes sont encore agissantes.
La Commission rejettera le recours du militant et François Sureau apprendra ,plus tard, au hasard de la lecture d'un journal l'assassinat du militant et il nous dit son émotion, sa hantise,ses pensées , son pèlerinage sur la tombe de ce militant.Comme il l'écrit il a oublié le visage de beaucoup de morts mais pas celui-ci et il a cette formule que je ne cite qu'à peu prés : "La faute renforce la mémoire" surtout quand la faute (d'ailleurs collective) est commise par un homme juste. Voyez dans cette video comme il en parle remarquablement.Et je partage cette idée que le droit n'est pas tout. Les romains le disaient déjà "summum jus summa injuria" (voir pour une analyse poussée de cette expression par J. Carbonnier. Voir aussi sur Babelio toutes les critiques des lecteurs qui tous ont adiré ce texte