mardi 22 octobre 2019

Julien Green: un nouvel éclairage.

La parution dans la collection Bouquins d'une partie du journal  (1919-1940) non expurgée de Julien Green fait couler beaucoup d'encre et d'analyses et constitue l’événement de cette rentrée littéraire.
Je me suis intéressé à cet écrivain depuis longtemps et dans mon dernier livre : "Le vieux monsieur à Venise" parmi les rares écrivains que je cite il y a Julien Green. Dans son oeuvre qui est importante j'avais aimé le journal mais plus encore trois livres un peu autobiographiques et dont les titres superbes me faisaient rêver: Partir avant le jour, Mille chemins ouverts et Jeunesse dans lesquels il évoquait à demi-mot son attirance pour les garçons et , nous disait-il , le tumulte que cela entraînait chez lui parceuqil était déchiré entre un désir de pureté qu'il estimait devoir à la religion catholique qu'il avait embrassé dans sa jeunesse et ses désirs.
Le reste de son oeuvre et notamment ses romans m'avaient moins plu.Je constate qu'il fut très ami de Gide dont il parle souvent, chez qui il se rend et qu'il reçoit souvent. A titre anecdotique j'apprends qu'il a séjourné à Hammamet et notamment chez Sebastian dont on peut voir encore la très belle maison et le parc. Il a également séjourné plusieurs semaines à Pau.
Il était considéré comme le grand écrivain catholique avec François Mauriac et l'ironie du monde fait que les deux avaient des tendances homosexuelles plus cachées chez Mauriac mais également chez Green.
Or le nouveau journal qui concerne la période parait aujourd’hui avec tout ce qui avait été supprimé par Green lui-même de son vivant mais qu'il avait précieusement conservé. Cet ajout est important (plus de 60 pour cent de nouveaux textes) et ces ajouts ont une coloration presque' uniquement sexuel et sont  souvent très cru, à la limite de la pornographie.
Les critiques ont tous cité des exemples comme Philippe Lançon dans Liberation des émissions lui ont été consacré et notamment chez France culture.
Certains se sont demandé s'il fallait publier cela. je pense que la réponse ne peut qu'être affirmative car dans le cas contraire on disserte sur un écrivain et sa vie en passant à côté de ce qui a été ,visiblement, une partie importante de sa vie. La façon dont il a  , à la fois caché et voulu, au fond de lui-même, que cette partie du journal soit publié après sa mort est intéressante et , notamment cette crainte qu'il exprime un jour que des personnes bien intentionnées, qui l'admirent et l'aiment ne supprime tout cela pour garantir une image de lui, fausse au demeurant. Voici comment il s'exprime dans son journal sur cette question On verra ,ici, comment il s'exprime chez Pivot avec une certaine malice mais encore très secret.La préface de M. Tristan de Lafond, dont j'apprends au passage qu'il est le Premier Président de la Cour de Montpellier, est captivante,notamment sur cette question de la publication.
Dans un article long et documenté un critique remet ce journal en perspective et analyse les avis de Julien Green sur ces confrères et c'est toute une époque littéraire qui renaît.
Il est assez évident que cette parution à un moment où l'église est, par ailleurs, environnée de scandales en tous genre et qu'un livre "Sodoma" a révélé la place très importante de l'homosexualité en son seing va encore perturber un peu plus les catholiques et je me réjouis, de mon côté, que cette parution montre a quel point la lutte déraisonnable d'une partie de l'Eglise contre l'homosexualité est le fait , en partie de grands hypocrites.
                                                               

samedi 12 octobre 2019

Hommage a André Labarrère

Treize ans déjà qu'il a disparu! J'ai appris son décès alors que je me trouvai en Tunisie mais j'ai pu voir la grande émotion de tous les palois tous âges et toutes tendances confondues. Il est vrai qu'il était un Maire très présent et qui aimait visiblement le contact avec les palois. Ne l'appelait-on pas "tocmanet" en béarnais celui qui serre les mains!
Je découvre ce très beau film qui nous montre un personnage romanesque que j'ai eu la chance de côtoyer plusieurs années ayant été élu dans sa liste Conseiller Municipal en 1971.
Le film lui ressemble et il est émouvant parce qu’André Labarrere s'exprime, déjà malade peu avant sa fin et que le choix de la musique est parfait.
Je me dis aussi en revoyant ce parcours que les palois qui l'ont pleuré ne l'ont pas assez honoré. Certes la Médiathèque porte son nom , ce qui ,pour l'homme de culture qu'il était, n'est pas rien mais n'aurait-il pas mérité aussi une Avenue ou une grande Place?

Camus brûlant de Benjamin Stora et Jean-Baptiste Pérétié

Ce petit livre paru chez Stock en 2013 est la réponse de Benjamin Stora et Jean Baptiste Pérétie à leur éviction de l'organisation d'une exposition Camus qui était prévu  dans le cadre de l'opération Marseille-Provence.
Le récit de  cette éviction en 2012 est passionnant car il montre bien comment la droite, l'extrême droite et la gauche ont tenté de s'approprier Camus à propos de l'Algérie.
La position de Camus sur la guerre d'Algérie était,chacun le sait, tout a fait nuancée et c'est ce qui permet a chacune de ces parties de tenter de l'annexer.
On lira le détail du conflit et le rôle joué par les uns et par les autres mais ma conviction est qu'il est absolument impossible de penser , ne serait-ce qu'un instant, que la droite et l'extrême droite ont une quelconque raison  de croire que Camus aurait pu être proche de leurs idées.
Et il est bon que ce petit livre tout en admettant la nuance, les hésitations de Camus démontre clairement qu'il n'a rien à voir et n'aura jamais a voir avec la droite et l'extrême droite.
Le livre évoque aussi, dans ces tentatives de récupération la décision de Sarkozy de transférer les restes de Camus au Panthéon. Certes il est un de ces écrivains qui trouverait sa place entre  Victor Hugo, Voltaire mais , quant à moi, je suis heureux de la décision de son fils qui a refusé cette panthéonisation en pensant que son père aurait préféré demeuré à Lourmarin ce pays qu'il avait choisi (avec René Char) et qui lui rappelait son Algérie natale.
Le livre revient aussi sur l'opposition en Algérie à la "caravane Camus" autre démonstration de ce que les politiques ne savent qu'instrumentaliser certaines questions et qu'ils sont inaptes à accepter et à comprendre les subtilités, les nuances en un mot la richesse d'une pensée.