vendredi 8 mars 2019

Venise a double tour de Jean Paul Kauffman

Un ami m'a signalé la parution de ce livre sachant mon amour pour Venise. Je l'en remercie car j'ai beaucoup aimé ce livre que j'ai lu aussitôt. Un élément m'a poussé à le commander rapidement. J'ai lu , en effet, dans la présentation de cet ouvrage que Jean Paul Kauffman avait passé plusieurs mois à Venise et précisément dans le quartier de la Giudecca où je séjourne moi-même lorsque je vais à Venise.
Sur ce plan je n'ai pas été déçu et l'auteur donne des nombreuses indications sur son séjour et, tous les lieux, restaurants, cafés et commerces dont il parle je les ai fréquenté très souvent. Il montre bien aussi ce qui fait le charme de la Giudecca ,à la fois loin et toute proche de Venise, son calme, ses habitants véritables et anciens vénitiens et la vue que la Giudecca donne sur Venise qui, pour moi, est la plus belle et Jean Paul Kauffman le dit aussi.Il évoque ces promenades le soir dans le quartier et dans ce petit endroit qu'est la Giudecca je retrouve mes propres pérégrinations! Il écrit ce à quoi je souscrit entièrement : "De jour comme de nuit, le panorama depuis la Giudecca est sans égal.Je n'en connais pas de plus beau ni de plus glorieux."
Il a souvent sur cette ville des notations pertinentes et par exemple (p.57-58): " Ce que j'ai toujours apprécié dans cette ville, c'est qu'elle ne dissimule ni ses plaies, ni ses fissures, ni ses crevasses, ni ses affaissements. Ce qui est rompu, entrouvert ou lézardé est exhibé."
Il y a aussi l'évocation d'un certain nombre d'écrivains amoureux de Venise et notamment de Sartre qui aimait beaucoup cette ville et qui a même écrit-ce que j'ignorai-un livre "La Reine Albemarle"
Sur le fond le projet de l'auteur m'a, au début, paru très singulier puisqu'il était décidé a visiter toutes les Eglises de Venise qui sont fermées depuis souvent des dizaines d'années. Je me disais et il fait,lui-même la réflexion que l'on a bien assez avec les Eglises ouvertes que  l'on a du mal a connaître toutes ainsi que les oeuvres qu'elles renferment. Mais je dois dire que je me suis laissé prendre a cette sorte de suspens dans lequel il nous plonge: arrivera t-il ou non a se faire ouvrir ces Eglises fermées comme des forteresses? Ces églises fermées dépendent de plusieurs institutions: le Patriarcat de Venise, l’Hôpital, les Services culturelles et les recherches ne sont pas simples et lorsque l'auteur obtient, enfin, un rendez-vous avec le Grand Vicaire il doit jouer serré avec ce personnage important pour son projet et qui est en lui-même une énigme!
C'est aussi ,pour lui, une manière de répondre à la question qu'il pose et se pose tous ceux qui veulent écrire sur Venise:"Comment écrire sur cette ville sur laquelle tant et tant a été dit?" Et bien l'auteur a trouvé un angle singulier, original que cette recherche inlassable des Eglises fermées dans une ville qui en compte tant.
L'auteur nous explique les premières émotions religieuses de sa jeunesse qui, sans doute, sont l'explication de cette quête peu ordinaire.
Beaucoup de critiques picturales et l'on voit bien que l'auteur est un amateur très éclairé, des pages intéressantes sur la cuisine à Venise pour déplorer comme je le fais moi-même que, dans l'ensemble ,on mange assez mal dans les restaurants de Venise,sur les méfaits du tourisme de masse bien connus mais difficiles a régler
Ce livre plaira aux amateurs d'art et notamment de peinture. Le projet initial me paraît toujours après lecture assez artificiel mais je répète qu'on se laisse prendre a cette recherche et qu'au fil des pages on en apprend beaucoup sur Venise.

1 commentaire:

Liliane Casalot. a dit…

Lectrice de Kauffmann je ne découvre que maintenant ce Venise. j'ai pensé tout de suite à vous à cause de la Guidecca, et les souvenirs de mon dernier voyage sont remontés à ma mémoire, d'autant que comme K. mon sestière préféré est Cannaregio.
Tout ce qu'il écrit et que tu soulignes est d'une justesse confondante et j'ai particulièrement aimé la justice qu'il rend à Sartre qui "a parlé de l'eau de Venise comme personne".
Contrairement à toi, par contre , le projet du livre, la découverte des églises fermées, ne m'a pas étonnée été et m'a même convaincue. Depuis son premier livre , K. part à la découverte de lieux improbables: les Kerguelen, Sainte Hélène, Courlande...qui ont en commun d'être d'espaces pratiquement inexistants, comme le fut sa vie d'otage pendant trois ans. Cette épreuve, a été capitale pour lui. Bien que très pudique, il lui a consacré La maison du retour, et dans Outre-Terre (consacré à l'improbable Kaliningrad, anciennement Koënisberg), affleurent des réminiscences de ce terrible traumatisme formateur, et dans Courlande, tout en restant grand reporter historien géographe,il ne cesse de chercher l'existence en 1991 de ce bout du monde qui fut en d'autres temps le royaume des barons baltes descendants des Chevaliers Teutoniques.
Pour la peinture, il a fait on ne peut plus fort en consacrant un livre à La lutte de l'Ange de Delacroix qui est à l'église Saint Sulpice et dans Outre-Terre il décortique inlassablement La bataille d'Eylau de Antoine-Jean Gros.
Kauffmann est un garçon un peu obsessionnel, moi j'aime.