Publié dans Kapitalis
Analyse pour une
interdiction des partis religieux.
J’écris ce texte après avoir lu de très nombreux articles de juristes constitutionnalistes et hier l'article de Monsieur Mezri Haddad dans Kapitalis. Une très grande majorité pour ne pas dire l’unanimité dresse un constat accablant des règles constitutionnelles et électorales qui gouvernent la Tunisie et qui ont été voulu, ne l’oublions pas ,par les islamistes.
Ces règles dans leur principe ont été élaborées et certains les justifient encore par le fait qu’elles empêcheraient tout retour à la dictature.
Alors certes aucune dictature n’est possible car il n’y a en réalité aucun pouvoir :
le Président à Carthage n’a aucune réel pouvoir, l’Assemblée divisée et composée d’une multitude de partis qui ne représentent rien n’a pas ,non plus, le pouvoir et le Premier Ministre est, malgré tout sous la coupe de quelques partis qui font des alliances contre nature et qui ont le pouvoir de nuisance et celui de le démettre.
Autant dire que le pays n’est absolument pas dirigé, qu’aucun réel programme n’est en place et cela se constate jour après jour depuis dix ans avec une régression dans tous les domaines telle que le pays n’en a jamais connu !
Beaucoup des constitutionnalistes que je lis font ce constat et estiment que la Constitution et les règles électorales doivent impérativement être changées.
Pourquoi malgré cette belle unanimité de l’analyse cela ne se fait pas ? Et bien tout simplement parce que les islamistes d’abord mais aussi quelques partis opportunistes et sans patriotisme, savent qu’avec un changement des règles ils sont à peu près sûr de perdre leurs postes et leur maigre pouvoir de nuisance.
Mais il y a autre chose ! Et cela je ne le lis jamais.
Il faudrait aussi interdire les partis qui utilisent la religion. Et je vais dire pourquoi car , selon moi il existe des raisons fondamentales de le faire.
La première des raisons est que les partis islamistes qui instrumentalisent la religion ont, partout où ils ont eu le pouvoir, conduit leurs pays au désastre et au déclin. Ils ont fait régresser des pays qui étaient sur la voie du progrès et les ont fait faire un bond en arrière évident.
Ceux qui ont eu une apparente réussite ne l’ont eu qu’au prix d’une dictature et parce que ils avaient des richesses sur leur territoire. Examinez le cas de l’Iran et celui de la Turquie et demandez vous si c’est une réussite en terme de démocratie et de liberté !
Quant aux autres, ceux qui soutiennent, hors de chez eux, une démocratie islamiste ce sont des dictatures plus ou moins familiale et dans lesquelles il n’existe aucune liberté!
La seconde raison plus juridique celle-là est que les partis islamistes qui accaparent le religieux ont nécessairement une vocation totalitaire et dictatoriale dans la mesure où ils prétendent parler au nom de Dieu, usurpant de manière d’ailleurs blasphématoire le nom et la parole de Dieu.
Quand vous parlez selon la « parole de Dieu » en tous cas celle qu’apparemment vous adoptez, pensez vous qu’il y a une place pour une autre pensée, pour d’autres règles ?
Avez-vous déjà entendu une religion dire : « voilà ce que veut Dieu » mais faisons autre chose plus conforme à notre intérêt ?
Toutes les religions et pas seulement l’Islam ont une vocation totalitaire et veulent de manière univoque le respect de ce qu’elles croient ou présentent comme étant la volonté divine. Le Catholicisme a été totalitaire :il a été à la base de la monarchie absolue.
Une religion cesse d’être totalitaire non pas dans sa vocation mais dans la pratique quand dans un pays elle est minoritaire où que la volonté populaire l’a mise en dehors du jeu politique , en dehors du pouvoir.
L’histoire nous démontre cela avec éclat.
Troisièmement, en dehors de cette dérive totalitaire inévitable, puisque parlant soi-disant au nom de Dieu, ils ne peuvent se tromper et ne peuvent admettre une opposition, ces partis dans les pays à grande majorité musulmane ne peuvent qu’aboutir à une division inacceptable entre « les bons musulmans » ceux qui adhérent à leur parti et « les mauvais musulmans » ceux qui les combattent .
Et puis je demande aux musulmans de réfléchir au fait qu'il y a, de toute évidence, de nombreuses obédiences de l'Islam. Quel rapport entre des soufis et des fondamentalistes? Alors qu'est un parti qui se fonde sur l'Islam? Quel Islam? Cette simple réflexion montre qu'il y a grand danger de divisions et la division est dangereuse pour tout peuple et une Constitution doit tenter d'éviter tout ce qui peut être source de division et de paralysie.
Alors ce qui s’est passé en Tunisie a été un contre sens par rapport a cette situation, pourtant, selon moi, évidente.
M Yad Ben Achour qui est , je n’en disconviens pas, un grand universitaire a tenté, en allant chercher dans le Coran, ce qui pouvait lui permettre de dire que l’Islam était compatible avec la démocratie. Je dois dire que sa démonstration est assez laborieuse et qu’elle est contredite par des milliers d’année d’histoire.
Par ailleurs savoir si l’Islam est compatible avec la démocratie ne résout pas le vrai problème qui est celui de l’existence même de partis politiques basés sur l’Islam. Même si l’Islam est compatible avec la démocratie, cela veut seulement dire qu’un pays ,dans lequel la majorité des citoyens sont musulmans, peut avoir un pouvoir politique démocratique mais cela ne veut en aucun cas dire qu’il faille accepter qu’un parti instrumentalise la religion car dans ce cas outre que ce parti divisera les citoyens musulmans entre les bons et les mauvais, il aura lui, une vocation totalitaire même si il veut la camoufler et la réalité dans tous les exemples de l’histoire l’a démontré.
Je pense donc que le Professeur Ya d Ben Achour a commis une très grave erreur en favorisant la Constitution actuelle de la Tunisie.
Certains de ceux qui, avec lui, voulaient cette Constitution avaient peut être un agenda et des projets cachés. Je n’en sais rien mais ,une chose est certaine, ils ont nui et gravement par leur idéologie a ce pays en le faisant régresser , le mettant en danger et en le traitant avec un certain mépris puisqu’ils lui donnaient une règle qu’ils se gardaient bien d’appliquer chez eux !
Je pense donc fortement qu’il appartient aux règles constitutionnelles de faire en sorte d’empêcher une telle dérive totalitaire et elle n’est possible qu’en interdisant les partis religieux car ils créent de manière inévitable et très grave une division de la société , une « fitna » qui ne peut que nuire au fonctionnement des pays.
Et ce d’autant qu’ils utilisent abusivement les mosquées et les imams pour leur propagande mettant tous les autres partis dans une position d’inégalité contraire aux règles d’une réelle démocratie.
Depuis la survenue de ce véritable cancer qu’est l’islamisme politique la politique est devenue inefficace et donc a été atteinte dans son essence même car elle a conduit les citoyens à douter d’elle mais, d'un autre côté, la religion aussi a perdu du terrain car beaucoup se sont demandé à quoi croire quand ils voyaient les dérives commises par les prétendus « religieux ». On ne compte pas les jeunes et moins jeunes qui, désormais ont relégué la religion au rayon des idées nuisibles. Paradoxalement ces partis qui prétendent défendre la religion (ce qui en réalité est une immense hypocrisie) lui nuisent infiniment.
De toute manière dans l’histoire de toutes les religions elles ont montré que lorsqu’ elles étaient au pouvoir elles étaient dictatoriales.
Je pense donc qu’il existent des raisons objectives et majeures d’interdire ces partis et c’est une question dont les Constitutionalistes devraient s’emparer. Un article récent semble donner raison à mon analyse.
Après la parution de ce texte sur les réseaux sociaux et dans
Kapitalis, le Professeur Yad Ben Achour a répondu pour contester fermement ce
que j’avais écrit . Il déclare en substance qu’il a mis en garde et adressé de
nombreuses critiques à la Constitution sans être entendu, notamment par les
islamistes. Dont acte.
Cependant cette situation
a évoqué ,pour moi, la situation du Pape Pie XII au moment du nazisme et ce
qu’en dit Albert Camus. Il écrit en substance : « Moi, l’incroyant j’attendais qu’une
grande voix s’élevât à Rome pour condamner clairement et fermement le nazisme.
On me dit que la condamnation fut portée mais qu’elle le fut dans la langue des
encycliques ! La condamnation aurait été portée mais n’a pas été entendu.
Qui ne voit que c’est bien là le problème. »
Par ailleurs le Professeur Yad Ben Achour nous dit que la
condamnation des partis religieux ne peut être une condamnation générale mais
qu’elle devrait intervenir au cas par cas !
Dans ce cas on aimerait bien connaître les critères d’un tel
tri ! Encore le vrai et le faux Islam, le bon et le mauvais ! Mais
qui est habilité à le dire ? Et qui ne voit que cela entrainera encore et
encore des difficultés immense et des dérives inévitables ?
3 commentaires:
Comment pouvez-vous écrire que le professeur Ben Achour a commis une très grave erreur en favorisant la constitution actuelle de la Tunisie? C'est une contrevérité qui ne repose sur aucun fait, ni aucune information honnête. Avez-vous écouté mes interventions télévisées à toutes les étapes d'élaboration de la constitution, notamment mes critiques de l'article 1er, de l'article 6 (À propos duquel j'ai réussi péniblement à introduire la liberté de conscience), de l'article 39 que j'ai farouchement combattu, précisément à cause de son caractère identitaire et religieux? Avez-vous écouté mes conférences sur les vices rédhibitoires de la constitution à propos du fonctionnement des organes de l'État? Avez-vous lu au moins mon livre : Tunisie une révolution en pays d'Islam » dans lequel j'ai apporté une analyse critique détaillée de la constitution ? Avez-vous lu mes articles dans Leaders, La Presse de Tunisie, pour ne considérer que la presse francophone qui vous est accessible ? Votre seule source d'information est l'article de de Mezri Haddad. Permettez-moi de vous dire que vos sources sont pas fiables. Ayez au moins le souci de lire la mise au point que j'ai faite à propos de cet article malhonnête et mal informé.
Ce commentaire est accessible sur mon blog et je vais aussi le reproduire dans Facebook. J aurai aussi apprécier votre avis sur la nécessité d interdire les partis instrumentalisant la religion.
Monsieur le Professeur. Je prends note de vos protestations et je les publie. Cependant puis-je vous dire que la situation évoque ,pour moi, ce que disait Albert Camus au sujet du Pape Pie XII et de son attitude à l'égard du nazisme. Il écrivait en substance ( je cite de mémoire): "Moi l'incroyant j'attendais qu'ne grande voix s'élevât à Rome pour condamner clairement et fermement le nazisme. On me dit que la condamnation a été portée mais qu'elle l'a été dans le langage des encycliques. Qui ne voit que là est le problème: la condamnation a été portée mais elle n'a pas été entendue!" https://jpryf-actualitsvoyagesetlitterature.blogspot.com/... Par ailleurs je serai intéressé par votre position de principe sur l'interdiction des partis qui instrumentalisent la religion, qui crée une division et qui, utilisant les réseaux ( de certaines mosquées )rompent l'égalité avec les autres partis.
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